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DOSSIER

L'APPROCHE DU RISQUE DE 25 CEO

Si je vous dis «

risque

», quels sont les trois premiers mots qui vous viennent à l'esprit ?

Tout d'abord quelque chose de positif, comme

Opportunité

ou

Esprit d'entreprise

. Car

entreprendre revient à prendre des risques, à en avoir conscience et à les peser. Les risques

comme, d'une manière plus générale, les contraintes, sont source d'opportunité : l'esprit

d'entreprendre est dans l'art de transformer les risques et d'en faire une force. Si je dois

citer d'autres termes, ce serait

Zone de confort

, car il faut en sortir,

Contrôle

, parce que

les risques se pèsent et se maîtrisent. C'est la mesure du risque qui permet d'assumer une

certaine prise de risques, sans aller trop loin.

Quel est le principal risque des entreprises aujourd'hui ?

Le premier risque est le risque humain, que l'on peut décliner sous plein d'aspects, autour des

notions de savoir-faire et d'expertise et, bien sûr, la question de la sécurité des personnes…

Le meilleur capital des entreprises est le capital humain. Donc, à l'inverse, le premier risque

des entreprises est la perte de compétences, et donc de substance. Il faut pouvoir mobi-

liser les bonnes ressources, en bonne quantité, de bonne qualité, au bon endroit et au bon

moment. C'est d'autant plus important dans une entreprise qui, comme Rabot Dutilleul,

fonctionne en mode projet : pour chacun, il nous faut construire la bonne équipe, sur des

durées qui peuvent aller de quelques mois à quelques années. En conséquence, la gestion

des compétences est essentielle : il faut acquérir les ressources, les former, les entretenir, les

fidéliser et enfin les mobiliser et les motiver, car la perte de « sens » de la part des collabora-

teurs est aussi un vrai risque.

Quel pourrait être le principal risque à un horizon de 25 ans ?

C'est presque une question métaphysique ! L'humain restera un sujet majeur, avec de

nouvelles questions, passionnantes, liées à l'évolution de notre société : les salariés iront-ils

toujours au bureau le matin ou resteront-ils chez eux ? Chacun sera-t-il entrepreneur et créa-

teur de sa propre start-up ? Cela signifie-t-il que personne ne voudra plus jouer « collectif »,

comme le requiert la notion d'entreprise aujourd'hui ?

Un autre risque qui me préoccupe à long terme est le risque d'uniformité. Notre société est de plus

en plus normée, ce qui nous oriente vers un modèle unique : tout le monde travaille de la même

façon, utilise les mêmes outils, le même moteur de recherche, les collaborateurs sont formés sur

le même moule, etc. Cela conduit à une uniformisation générale, et donc à une perte d'innovation

et de créativité. Pour prendre un exemple : on se rend déjà compte qu'avec la mise en place de la

nouvelle Réglementation bancaire de Bâle III, toutes les institutions financières font les mêmes

calculs et appliquent le même modèle de financement. Les entreprises sont soit en dedans, soit en

dehors, de ce nouveau cadre très figé où la prise de risque est estimée par un ordinateur ! Les solu-

tions de financement proposées sont aujourd'hui toutes identiques alors qu'auparavant chaque

banque avait un modèle et une appréciation du risque qui lui était propre, ce qui permettait de

trouver des solutions adaptées…

Quels étaient les risques principaux il y a 25 ans ?

Lorsque mon père et mes oncles dirigeaient l'entreprise, le premier souci était sa pérennité.

La situation est aujourd'hui difficile, mais il faut se souvenir que certaines crises ont été

encore plus violentes ! Rabot Dutilleul a été fondée en 1920 : nous avons notamment traversé

la crise de 29 et la Seconde guerre mondiale, etc. Pour la troisième génération (je représente

la quatrième), le choc pétrolier a été une crise terrible… Non seulement, ils ont assuré la

pérennité de l'entreprise, mais ils ont su grossir et – surtout – grandir, en mettant en place

une gouvernance claire et ouverte, enrichie par la venue d'administrateurs indépendants.

Le risque en une phrase ?

«

Le pire risque est de ne pas en prendre !

» On ne peut pas vivre sans prendre de risques…

François Dutilleul,

Président du Directoire de Rabot

Dutilleul Investissement

Groupe familial indépendant

et international de promotion-

construction

Créé en 1920

Dans le top 10 des acteurs

français du BTP.

792 millions d'euros

de chiffre d'affaire

1 850 salariés

FRANÇOIS DUTILLEUL

PRÉSIDENT DU DIRECTOIRE DE RABOT

DUTILLEUL INVESTISSEMENT

«Le pire risque

est de ne pas en

prendre !»

© Maxime Dufour Photographies

ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE

I N°11 I

DÉCEMBRE 2016

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