DOSSIER
L'APPROCHE DU RISQUE DE 25 CEO
Si je vous dis « risque», quels sont les premiers mots qui vous viennent à l'esprit ?
Déséquilibre
, parce qu'il faut nécessairement sortir de sa zone de confort et se mettre en
déséquilibre pour avancer, comme lorsque l'on apprend à marcher. Il faut toutefois avoir
confiance dans sa seconde jambe, qui va devoir réceptionner… et c'est pour cela que le
deuxième mot que je choisis est
Confiance
. Il ne s'agit pas d'être téméraire : c'est en prenant
un risque maîtrisé que l'on peut réussir.
Succès
sera donc mon troisième mot.
Quel est le principal risque des entreprises aujourd'hui ?
En France, c'est clairement le risque social ! Il ne s'agit pas d'un risque de grève, à l'an-
cienne, mais plutôt d'un risque de démotivation. Si nos collaborateurs viennent au bureau,
mais refusent de partir en mission ou décident de poser le stylo, mes moyens d'action sont
extrêmement limités : je ne peux ni les obliger à travailler, ni les congédier… De fait, je suis
régulièrement confronté à des collaborateurs qui voudraient mener à bien un projet personnel
et me demandent à être licenciés pour ne prendre aucun risque : ils n'ont plus confiance dans
le système - ou dans l'État - et considèrent que le chômage leur est dû. Je suis donc face à une
situation à laquelle je ne peux souscrire. Pour une entreprise comme Talan, la démotivation
des équipes est un risque très important car nous avons deux principaux actifs, tous deux
volatiles : nos clients, qui peuvent décider de changer de prestataire en peu de temps, et nos
consultants, qui peuvent nous quitter sous trois mois. Nous mettons donc tout en œuvre pour
maintenir la motivation de nos collaborateurs, nous les sondons très régulièrement, nous les
impliquons et nous les associons aux résultats de l’entreprise. D'ailleurs, depuis deux ans,
nous faisons partie du Top 20 des «
Best workplaces
» (classement
Great Place to Work
) et nous
avons intégré cette année le Top 5 des ESN de ce palmarès pour la France.
Comment est-il possible d'identifier des risques émergents ?
Par le dialogue, l’observation permanente et la consultation. En se remettant en permanence
en question et en essayant de sortir de sa zone de confort…
À quels risques les entreprises pourraient-elles être confrontées dans… 25 ans ?
Ce sera le même risque qu'aujourd'hui : celui de ne pas durer. Depuis toujours, les entre-
prises se demandent comment durer en créant plus de richesses qu'elles n'en consomment.
L'histoire se répète. La technologie change des choses, bien sûr, mais le fond du problème
reste le même : comme au Moyen-Âge, les États cherchent aujourd'hui à percevoir la dîme sur
les places de marchés qui se sont développées à leurs portes… Mais les Robin des Bois d'au-
jourd'hui que sont AirBnb ou Uber ne seront prêts à payer l'impôt que si, en échange, on leur
apporte quelque chose ! Ainsi, si la conjoncture et les technologies sont nouvelles, le schéma
reste identique : en tant qu'entrepreneur, je dois sans cesse me demander comment je peux
créer plus de richesses que je n'en consomme.
Le risque en une phrase ?
«
Pour réussir, il faut prendre le risque d’échouer
». C'est une vérité absolue mais elle est pour-
tant difficile à admettre pour beaucoup de gens, qui voudraient avancer avec un risque zéro.
Celui-ci n'existe pas, même s'il faut bien sûr identifier les risques et décider de ne pas se
lancer si l'on est confronté à un risque maximal. En France, nous n'avons pas la culture de
l'échec, pourtant on apprend beaucoup plus de l'échec que des succès. On avance grâce à ses
succès, mais on progresse grâce à ses échecs.
MEHDI HOUAS
CO-FONDATEUR ET PRÉSIDENT DE TALAN
«Pour réussir,
il faut prendre le risque
d’échouer.»
Mehdi Houas,
Co-fondateur et Président de Talan
❱
Conseil sur la transformation
agile des entreprises
❱
Fondée en 2002
❱
200 millions d'euros
de chiffre d'affaires à fin 2016
❱
1 800 salariés
© Philippe Sautier
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°11 I
DÉCEMBRE 2016
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