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À L’AFFICHE

REVUE DE PRESSE

/

L’agefi hebdo

31

du27 octobre au 2novembre 2016

à stabiliser l’intangible avec des

garanties qui leur permettent de

couvrir leurs actifs immatériels,

les pertes financières ou les dom-

mages financiers »,

atteste-t-elle.

Paradoxalement, les entreprises

montrent pour l’instant assez peu

d’appétence pour ce type de cou-

verture. A l’Amrae, moins d’une

dizaine d’adhérents couvrent

aujourd’hui leur risque de répu-

tation. Même constat du côté

d’AGCS.

«Depuis que nous avons

lancé notre offre en 2013, nous

comptons une dizaine de clients

en France dans les secteurs de

l’agroalimentaire et du tourisme,

confie Iouri Goloubtzoff.

Il s’agit

d’entreprises qui possèdent une

marque forte, et qui figurent dans

la fourchette haute des ETI avec

des chiffre d’affaires un peu en

dessousdes500millionsd’euros.»

Ce peu d’appétence

tient

d’abord à unmanque dematurité,

pour Olivier Forlini, directeur du

Reputation Institute en France

.

«Une de nos études amontré que

seulement 15% des entreprises ont

mis en place des processus afin de

mesurer leur réputation sur l’en-

semble de leurs parties prenantes.

Comment voulez-vous dans ces

conditionsqu’elles investissentdans

ce type de solutions ? »,

expose-t-

il.

« Les ‘risksmanagers’ ont aussi

été un peu échaudés ces dernières

annéesparde soi-disantsnouveaux

produits, notamment sur le ‘cyber’

ou la ‘supply chain’, qui n’étaient

finalement pas si nouveaux que

cela, et appréhendaient mal la

complexité de ces risques,

ajoute

u

Lesassurancespour le

risquede réputationciblent

pour l’heure lesacteursde

taille intermédiairequisont

plussensiblesà l’absence

desavoir-faire interneet

aucaractèredangereuxdu

risquede réputation�

« Ilest

beaucouppluscompliquéde

vendrece typedeproduits

auxgrandsgroupesparce

qu’ilsontdans leurséquipes

decommunicationdes

collaborateursquiontdéjà

gérédescrises,etqu’ilssont

persuadésd’êtrepréparés

à lesaffronter

,observe Iouri

Goloubtzoff, responsable

assurance lignesfinancières

pour lessociétéscommerciales

chezAGCSFrance�

Sinous

avionscontactédesgroupes

victimesde tellescrisesune

semaineavantqu’elleséclatent,

ilsnousauraientprobablement

réponduqu’ilsétaientprêts...»

Les eTi en première ligne

le retrait des produits déjà commer-

cialisésouqui sont toujours en stock

chez les distributeurs, le réassort

avec des produits sains...La gestion

de la crise industrielle, commerciale

et médiatique par des communi-

cants spécialisés est également prise

en charge, tout comme les pertes

d’exploitation qui se traduisent en

général par une baisse du chiffre

d’affaires.

«Cette assurance couvre

aussi les préjudices causés aux tiers,

complète Gildas Tual, directeur de

Bessé Agro.

C’est-à-dire les dom-

mages corporels lorsqu’un produit

amis en danger l’intégrité physique

des consommateurs, mais aussi les

préjudices immatériels qu’un four-

nisseur doit payer à un industriel

parcequ’il luia livréunproduitnon

conforme qui a contraint cet indus-

triel à retirer son propre produit du

marché. »

Deux autres courtiers ont égale-

ment pris position sur ce segment

de l’agroalimentaire. Gras Savoye

propose depuis 2014 « Impact

Image », une solution avec des

capacités en réhabilitation d’image

de marque allant jusqu’à 15 mil-

lions d’euros. De son côté, Aon

Risks Solutions a élargi son champ

de prospection aux équipementiers

automobiles et aux biotech, avec

des montants de garantie moyens

compris entre 7,5 et 15 millions

d’euros, pouvant aller jusqu’à

150millions d

’euros.Le

réassureur

allemandMunic

h

Re a, lui, lancé

en 2012 une assurancemulti-secto-

rielle.Baptisée«ReputationalRisk

Insurance », elle se concentre sur

l’indemnisation des pertes finan-

cières lorsqu’un incident affecte

la réputation de l’entreprise, que

lesmédias s’emparent de l’affaire,

et que la crise entraîne une baisse

significative du chiffre d’affaires.

L’année suivante, à la demande de

PME allemandes qui souhaitaient

protéger la réputation de leur

savoir-faire et de leurs produits à

l’import-export, Allianz Global

Corporate& Specialty s’est posi-

tionnéà son touravec«Reputation

Protect », une police d’assurance

dotée d’une couverture maximale

de 10 millions d’euros qui se dis-

tingue par un angle

d’attaque diffé-

rent.

«Nous avons

en effet considéré

qu’en l’étatde l’art,

il était très difficile

de quantifier l’im-

pact de la réputa-

tion sur labaissede

chiffre d’affaires

,

souligne

Iouri

Goloubtzoff, res-

ponsable assurance

Lignes Financières

pour les sociétés

commerciales chez AGCS France.

Nous avons donc préféré nous

focaliser sur l’accompagnement de

nos clients en mettant à leur dis-

position une garantie qui prend

en charge l’ensemble des frais per-

mettant à l’entreprise

de retrou-

ver le même niveau de réputation

qu’avant la crise. Un rapport réa-

lisé par l’InstitutMedia Tenor au

moment de la souscription nous

donne en effet une photographie

très précise de sa réputation.C’est

sur la base de ce rapport que nous

calculons lemontantde laprime.»

attente

Pour Bénédicte Huot de Luze,

déléguée générale de l’Amrae,

l’association qui fédère les profes-

sionnels de la gestion des risques

et des assurances, l’apparition

de solutions visant à protéger la

réputation correspond à une vraie

attente de la part des entreprises.

« Les ‘risks managers’ cherchent

Management et responsabilité

Intégration

Intelligence et stratégie

Où en est l’entreprise

sur le sujet ?

Intégration

à la stratégie

long terme,

investissements

Mise enœuvre

transversale

Planificationdes actions

Management etmesures

Exploitations

et réflexionsdebase

%

Entreprises

15%

1

2

3

4

5

12%

3%

37%

33%

Source :Reputation institute

Un sujetpeumaturedans les entreprises

32

L’agefi hebdo

/du 27 octobre au2 novembre 2016

BénédicteHuot de Luze

. Il a fallu

cinqanspourque le ‘cyber’atteigne

une certainematurité, grâce à une

meilleure formulation des besoins

t à une nette augmentation des

capacités. »

Pour l’heure,les montants des

garantiesproposéspar les assureurs

peuvent effectivement se révéler

insuffisants pour les plus grandes

entreprises en cas de crise de répu-

tationmajeue.

« Personne ne sait

aujourd’hui assurerunpréjudicede

3 milliards d’euros, comme celui

que vient d’annoncer Samsung, les

assurancesdumarché ayant actuel-

lement une capacité maximale de

150 millions d’euros »,

précise

Johanne Charbit, directeur des

risques de responsabilité chz Aon

RisksSolutions France

.

Ces garan-

ties étant par ailleurs nouvelles, les

courtiers sont obligés de solliciter

plusieurs assureurs afin d’attindre

lemontant de couverture. Le coût

peut aussi constituer un frein.

« Pour être couvert à hauteur d

de 10millions d’euros, lemontant

de la police oscille entre 70.000 et

150.000 euros,

dévoile Iouri

Goloubtzoff

. Tout le monde n’est

pas prêt à payer de telles sommes

afin de protéger sa réputation... »

frilosité

L’autre grande raison qui explique

la faible pénétration de ces produits

dans lesentreprises tientauxassureurs

eux-mêmes.

«Lescompagniesd’assu-

rances aiment bien s’appuyer sur la

‘data’ et les statistiques pour appré-

cier et quantifier le risque

, rappelle

Denis Bicheron.

Pour elles, évaluer

un risque incendie ou inondation est

très simple car il y a un historique et

des bases matérielles. En revanche,

elles ne savent pas encore comment

valoriser la réputation en tant que

telle, car il n’y a pas d’historique, et

ellesnesontpasà l’aiseavec lesévéne-

mentsdéclencheurs.»

Une« frilosité»

queBénédicteHuot deLuz regrette :

«Aujourd’hui, des sociétésmesurent

le ‘bruit médiatique’

de façon très fiable.

Par ailleurs, les consé-

quences financières liées

au risque de réputation

sont assimilables à des

pertes d’exploitation

sans dommage. Il est

donc possible d’utiliser

desmécanismes d’assu-

rance connus comme le calcul des

pertesd’exploitation.»

Cemanquedematuriténedevrait

toutefois pas empêcher le marché

de se développer dans les années

qui viennent, à en croire Johanne

Charbit.

« Le risque de réputation

prend une importance colossale. Il

concernedésormais tous les secteurs

d’activité etn’estplus corréléau seul

risque produits. Il touche aussi à

l’éthique, aux ressources humaines,

à l’environnement, à la sécurité des

personnes...Onpeutdonc imaginer

que, même si nous restons sur un

développement modeste en termes

devolumes etdeprimes, l’assurance

du risque de réputation fera partie

du kit de tous les assureurs et inter-

médiaires d’assurances »

, conclut

JohanneCharbit.

n

Desmontants

degaranties

souvent insuffisants

L'enquête

Quel regard portez-vous sur lemarchédes

assurances pour le risque de réputation ?

Les assureurs ot fait cesdernières années

des efforts très substantielspour concevoir

des solutions surmesure afindeprémunir

les entreprises contre le risquede réputation�

Cela étantdit,force estde constaterque

lesgaranties actuelles se concentrent

essentiellement sur laprise en chargedu

risqueméditique etdes actifsfinanciers liés

à laperted’exploitation et à la continuité

d’activité�Or le risquede réputation affecte

aussides actifs immatérielsquine sontpas

toujours couverts�

a quelsactifs pensez-vous ?

Le risque de réputation est unméta-risque

qui amlifie sur le planmédiatique un

risque primaire (un incendie, un fraude,

une contamination���), du fit notamment

de la pression desmédias, y compris

sociaux�Or si les assurancs savent

aujourd’hui gérer un retrait de produits

ou évaluer le coût d’une campagne de

communication de crise, elles ne savent

pas encore quantifier le lien de confiance

qui s’établit au fil des années entre les

consommateurs et lamarque incriminée,

ni le préjudice lié à la perte de confiance

dans cettemarque� Il faudrait donc que

les assurances prennent en charge la

reconstruction de la confiance, une étude

du Crédoc ayantmontré qu’elle nécessitait

beaucoup d’argent et de temps�

Comment voyez-vous évoluer cemarché

dans les années qui viennent ?

Ilme semble que les entreprises pourraient

être intéressées par desmécanismes

de prévention et de couverture plus

globaux, quimixeraient responsabilité

civile, responsabilité dommages et risque

d’opinion� La question qui se posera alors

sera celle du coût� Les assureurs devront

en effet résoudre l’équation qui leur

permettra de commercialiser des solutions

à un prix acceptable, et avec un niveau

de garanties suffisant pour donner envie

aux entreprises de couvrir leur risque de

réputation� Je suis toutefois persuadé

que cemarché a de l’avenir car il existe

une réelle prise de conscience chez les

dirigeants que le risque de réputation

peut détruire l’image de leur entreprise

en 24 heures, avec le risque de la voir

disparaître���

«Prendre en charge la reconstruction

de la confiance»

L’

avis

de

...

LaurentReynes

,directeurgénéral adjointdeBurson-Marsteller i&e,

en chargede la réputation

expeRtise

DR

Lagarantie «Cap image »

Une assurance adaptée à l’industrie agroalimentaire

Source :BesséAgro, conseil alimentaire

Responsabilités

Couverture

des risques

de réputation

Frais consécutifs

Coûtduproduit

Contamination

Pertedemargebrute

RISQUES RH

ÉTAT DU MARCHÉ

PERTE D’EXPLOITATION

Au pied du sapin

Le cyber encore et toujours, L’Etat 2016 du marché de l’assurance

dommage, la perte d’exploitation sans dommage, le club FrancoRisk,

le rôle du Risk Manager et le risque de réputation

FRANCORISK

RÔLE DU RISK MANAGER

CYBER

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L’agefi hebdo

/du 27octobre au 2 novembre 2016

par

YvesRivoal

n

ike, Total, Apple, BP,

Volkswagen, Samsung...,

ou encoreOrange,Findus,

la Société Générale ou

BNP Paribas pour la France. La

liste des entreprises ayant vu ces

dernières années leur réputation

mise à mal par des scandales res-

sembledeplus enplus àune litanie.

La multiplication de ces tempêtes

médiatiques a eupour conséqence

de propulser le risque de réputa-

tion sur ledevantde la scène.Dans

l’enquête réalisée en 2015 parAon

Risks Solutions, le préjudice à la

réputation et à l’image demarque

arrive en pole position des risques

majeurs. Deux ans plus tôt, il ne

figurait qu’à la troisième place du

classement.

C’est donc tout naturellement

que le marché de l’assurance s’est

intéressé à ce risque. En se concen-

trant d’abord sur l’industrie agroa-

limentairequiy estparticulièrement

exposée à travers la problématiqu

de la contamination. Le cabinet

conseil enassurancesBesséa été l’un

des premiers à se positionner sur ce

marché en lançantdès1995 la solu-

tion « Perte d’image demarque »,

qui a été remplacée cette

née par

unenouvellegarantiebaptisée«Cap

Image ». Cette solution couvre

à hauteur de 30 millions d’euros

maximum tous les frais engendrés

par lamise en caused’unproduit : le

remboursementdes consommateurs,

L’atteinteà la réputation s’imposecomme l’undesprincipaux risquespour les

entreprisesmais les solutionsd’assurancesdédiéespeinentà trouver leurmarché.

L'enquête

risque de réputation,

un défi pour l’assura ce

expeRtise

Fotolia

http://www.agefi.fr/

dossiers

RIS

QUE DE RÉPUTATION

ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE

I N°11 I

DÉCEMBRE 2016

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