LRE soit le Code civil. Il y a là un risque évident de concurrence des régimes
pour un dommage pourtant identique.
Or, le rapport n’envisage aucune mesure d’articulation entre les deux
régimes. Ce point est d’autant plus problématique que les auteurs du
rapport ont proposé une définition du préjudice écologique très diffé-
rente de celle de la LRE. Cette différence de terminologie est ainsi une
source supplémentaire d’insécurité juridique.
La création d’un régime parallèle, s’écartant des principes de la LRE,
conduirait donc à une incohérence des conditions de réparation d’un
même dommage.
Il est aussi prévu que la réparation serait « prioritairement » en nature
ou, à défaut, en dommages et intérêts. Ceci est en contradiction directe
avec l’objectif affiché d’une juste réparation du préjudice écologique qui
ne peut être obtenue que par une réparation en nature.
Dans ce contexte, n’est-il pas plus opportun de porter la réflexion sur
une amélioration du dispositif de la LRE afin de permettre une meil-
leure cohérence du droit et une réparation efficace du dommage envi-
ronnemental ? C’est ce que l’AMRAE a soutenu dans sa prise de position
adressée au Ministre de la Justice. Espérons qu’elle soit entendue.
QUELLES CONSÉQUENCES
POUR L’ENTREPRISE ET
LE RISK MANAGER ?
L’INSÉCURITÉ JURIDIQUE
Ce risque trouve son origine dans le fait que l’introduction du
préjudice écologique dans le Code civil viendrait s’ajouter au
dispositif existant prévu par la loi sur la responsabilité envi-
ronnementale et introduit quant à lui dans le Code de l’envi-
ronnement (art. L 161-1 et suivants).
Autrement posé, la responsabilité d’une entreprise pourrait
être recherchée sur le fondement de la LRE par le Préfet et sur
le fondement du Code civil par des associations, par exemple
pour la réparation d’un même dommage à l’environnement.
Or le rapport Jégouzo adopte des termes et concepts dif-
férents de ceux-ci figurant dans la loi LRE, parfois même
en ne les définissant pas. Pour n’en citer qu’un, la loi LRE
retient un critère de « gravité » qui inclut l’anormalité mais
également l’idée supplémentaire d’un impact négatif sur
l’environnement.
Le Rapport Jégouzo préconise quant à lui d’adopter le
concept d’« anormalité » sans plus de précision. Or ce qui
est anormal n’emporte pas nécessairement des consé-
quences importantes.
Le Rapport Jégouzo recommande en outre d’ouvrir lar-
gement l’action à réparation, ce qui induit un risque de
multiplicité d’actions et donc d’éclatement des demandes,
chaque demandeur pouvant agir pour une composante dif-
férente de l’environnement.
LE RISQUE FINANCIER
Rappelons que la LRE prévoit :
❑
Une réparation exclusivement en nature du dommage
environnemental,
❑
Une réparation intégrale via les différentes mesures de
réparations proposées (primaire, complémentaire et
compensatoire) tout en respectant le principe de pro-
portionnalité.
Les sommes à engager pour atteindre l’objectif fixé par la
LRE peuvent être considérables.
Le Rapport Jégouzo envisage trois hypothèses pou-
vant conduire à l’allocation de dommages et intérêts.
Parmi celles-ci, l’inefficacité des mesures de répa-
ration mises en œuvre.
Or on peut engager des mesures onéreuses dont
on pense légitimement qu’elles seront efficaces et
s’apercevoir ultérieurement que le résultat n’est pas à
la hauteur des attentes.
C’est le système de la « double peine ».
Nathalie Clerc,
Responsable Département Assurances
Groupe, Direction des Financements et
du Management des Risques, ERAMET
Le contenu du
Rapport Jégouzo appelle
bien d’autres commentaires,
la proposition relative à
l’introduction d’une amende civile
par exemple, et je vous invite à
prendre connaissance de la prise de
position de l’AMRAE disponible
sur le site de l’Association.
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DE L’AMRAE
I N°2 I
SEPTEMBRE 2014
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VEILLE ET POSITION