En juin 2013, la Commission européenne a adopté
une proposition de directive régissant les actions en
dommages et intérêts résultant de pratiques anticoncur-
rentielles (Articles 101 et 102 TFUE). Cette proposition a
été approuvée par le Parlement le 17 avril 2014 et envoyée
au Conseil de Ministres.
La proposition de directive énonce diverses mesures
visant à faciliter les actions en réparation.
Les juridictions nationales pourront enjoindre aux
entreprises ou aux tiers de divulguer des éléments
de preuve.
La demande devra être formulée de manière
aussi précise et étroite que possible et la divulgation
sera limitée aux seuls éléments pertinents.
Les destinataires d’une injonction de divulgation
auront la possibilité d’être entendus avant qu’une juri-
diction nationale n’ordonne la communication.
Les décisions de l’Autorité étatique de concurrence
constatant une pratique anticoncurrentielle consti-
tueront automatiquement la preuve de l’existence de
cette pratique devant les juridictions de cet Etat. Les
décisions des autorités de concurrence non nationales
constitueront de simples commencements de preuve.
Les règles concernant les délais de prescription devront
être clarifiées afin de permettre une indemnisation,
une fois la pratique constatée par une autorité de
concurrence. Le délai de prescription ne commencera
à courir qu’une fois l’infraction consommée. Il sera
interrompu ou suspendu par tout acte de poursuite ou
d’instruction d’une autorité de concurrence. De même,
le point de départ du délai supposera la connaissance
par le demandeur de la pratique et de son auteur ainsi
que du préjudice en résultant.
En l’absence de règles communautaires, il appartiendra
à chaque Etat membre de définir les règles précises
régissant l’exercice de l’action et d’instaurer un mode
de règlement consensuel des litiges.
La réparation intégrale portera tant sur la perte subie
que sur le gain manqué.
Pour la quantification du préjudice, exercice difficile, les
juges devront comparer la situation réelle des demandeurs
et celle dans laquelle ils se trouveraient en l’absence de
violation. Les juridictions devront être habilitées à estimer
le montant du préjudice s’il est pratiquement impossible
ou excessivement difficile à quantifier.
La directive pose une présomption réfragable de
préjudice pour les manquements résultant d’une
entente.
La victime n’aura pas à prouver le principe de
son préjudice mais seulement à rapporter la preuve du
quantum. En revanche, l’entreprise à l’origine de l’en-
tente pourra démontrer l’absence de préjudice.
Les entreprises ayant participé à une pratique anti-
concurrentielle seront solidairement responsables du
préjudice envers les victimes. Celle qui a obtenu une
immunité au titre de la clémence ne sera responsable
que du préjudice subi par ses acheteurs ou fournisseurs
directs ou indirects.
Quelle articulation avec les actions de groupe ?
Rappelons que la loi du 17 mars 2014 prévoit qu’en
matière d’actions collectives de consommateurs pour
violation des règles de concurrence, les décisions de
l’Autorité ayant retenu le caractère anticoncurrentiel
d’un comportement constituent une « preuve irréfra-
gable » de l’existence de la pratique. Les juridictions
françaises sont liées par ces décisions si bien que les
associations agréées n’auront qu’à rapporter la preuve
du lien de causalité et du préjudice.
Les Risk-Managers devront donc s’attendre à ce que ce
type d’action en réparation se développe et devront
l’intégrer dans les dispositifs de contrôle des risques.
Cabinet Bouckaert Ormen Passemard Sportes
CABINET BOPS :
DOMMAGES NÉS DE PRATIQUES
ANTICONCURRENTIELLES :
QUELLE INDEMNISATION ?
Rémi Passemard,
Avocat associé
Cabinet BOPS
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DE L’AMRAE
I N°2 I
SEPTEMBRE 2014
49
NOS PARTENAIRES