É
té 2011 : après quatre tempêtes consécutives et le débordement
de ses rivières, la Thaïlande doit faire face à de très fortes inon-
dations. Deuxmillions d’hectares de terres agricoles et près de 14
millions de Thaïlandais sont affectés, entre juillet 2011 et janvier
2012, par des crues qui auront causé près de 1 000 décès. Au-delà
de la catastrophe naturelle et humaine, ces inondations ont aussi affecté
l’économie mondiale, un grand nombre d’entreprises étant – sans même
le savoir parfois – directement ou indirectement dépendantes d’usines
situées dans la zone. En particulier dans les secteurs technologiques,
disques durs ou composants et avec des effets souvent violents. «
Un
fabricant de pneumatique a par exemple réalisé que son usine thaïlandaise
fournissait 30% des compagnies aériennes mondiales. Il n’avait pas pris
la mesure de la criticité de cet atelier pour l’industrie mondiale, ni imaginé
la pression qu’il allait subir pour remettre d’urgence l’appareil productif en
état de fonctionnement
» indique ainsi, dans une analyse, le spécialiste du
risque FM Global. Face à de tels événements, la sanction du marché peut
être aussi brutale que sévère : toujours selon FM Global, les actions des
sociétés ayant subi des ruptures de chaîne d’approvisionnement connaî-
traient en moyenne une baisse de 40% de leur valeur boursière...
À l’inverse, ceux qui parviennent à tirer leur épingle du jeu peuvent
bénéficier d’un sérieux avantage concurrentiel. À la condition toute-
fois de savoir communiquer sur le sujet. «
L’exemple de l’entreprise
américaine spécialisée dans les semi-conducteurs Microchip Technology
est parlant. Dotée d’un plan de continuité d’activité performant, elle
s’est montrée capable de pallier les déficiences de ses fournisseurs en
fabricant en interne certains des produits manquants, ou en se tour-
nant efficacement vers d’autres fournisseurs et a augmenté ses parts de
marché
» souligne Loïc Le Dréau, chez FM Global.
Concrètement, la communication de Microchip Technology s’est faite
en deux temps. Dès le 13 octobre 2011, dans un avertissement sur son
chiffre d’affaires et un communiqué de presse, la société annonçait
que ses «
deux usines, situées à quelque 50 miles à l’est de Bangkok,
fonctionnaient normalement et pouvaient répondre à la demande de leurs
clients
». L’entreprise précisait alors que sa «
chaîne de production en
Thaïlande étant fiable, elle avait pris des mesures
de sécurité supplémentaires pour assurer ses
besoins de production et ajouté des fournisseurs
alternatifs pour limiter tout risque sur la chaîne
d’approvisionnement
». Le 28 octobre, nouveau
communiqué de presse, cette fois-ci centré sur
les inondations : «
Microchip’s Thailand Factories
Operating Normally - No Imminent Danger Due to
Location
» (soit «
Nos usines de Thaïlande fonc-
tionnent normalement. Pas de danger immédiat lié
à la localisation
»). L’entreprise y dresse un bilan
– positif – de la crise, joignant des photos de ses
usines, clairement « hors-eau » et fait un état des
lieux de ses fournisseurs à travers le pays.
Lesmarchés ont positivement réagi à ces annonces.
La société, cotée au Nasdaq, a en effet vu son cours
de bourse progresser sur la période : à moins de
30 dollars le 19 août 2011, il était à 37 dollars le
4 novembre.
EXEMPLE D’UNE COMMUNICATION
DE CRISE RÉUSSIE
L’AMÉRICAIN MICROCHIP TECHNOLOGY
Peu impacté par les inondations en Thaïlande, le fabricant de semi-conducteurs a su mettre en
avant son avantage concurrentiel à travers une communication ciblée.
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DE L’AMRAE
I N°3 I
JANVIER 2015
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DOSSIER
COMMUNICATION SUR LES RISQUES