défaut de souscription, conduire vers la mise en cause des dirigeants
notamment au regard de l’évolution de certains risques devenus
des risques vitaux pour l’entreprise (cyber, fraude au président…).
D’autant que les instruments juridiques pour y parvenir existent déjà.
Par ailleurs, si la RCMS reste facultative, un arrêt du 27 mai 2015 de la
Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a confirmé, alors qu’il
ne s’agissait pas de construction, «
qu’un défaut de souscription d’une
assurance obligatoire par une entreprise caractérisait bien une faute
détachable des fonctions du représentant légal ou statutaire, et donc
qualifiait la responsabilité du dirigeant de l’entreprise concernée
». Cela
montre que la Cour de Cassation pose de moins en moins de limites à la
mise en cause des dirigeants sociaux.
SEPT ASSUREURS AU BANC D’ESSAI
Sept assureurs (AIG, Allianz, Axa, QBE, XL, Zurich, et HDI qui s’adresse
principalement aux ETI) ont accepté de décrypter leur offre. L’analyse
des tableaux montre une certaine homogénéité dans les capacités :
25 millions d’euros à l’exception d’Allianz et d’Axa qui affichent
jusqu’à 30 millions d’euros, et QBE qui propose une garantie jusqu’à
37,5 millions d’euros. Ces assureurs mettent en avant leur présence
à l’international qui leur permet de couvrir les clients dans toutes
les principales zones du globe et de s’adapter aux réglementations
locales. «
Lorsqu’une entreprise française se met à exporter vers de
nouvelles régions, ou bien rachète un concurrent étranger, ses manda-
taires sociaux sont confrontés à de nouveaux environnements et à de
nouveaux risques qui sont autant de possibilités de voir leur responsabi-
lité engagée
», rappelle Danilo Saitta, Responsable de la souscription
Lignes Financières France d’XL Catlin.
On peut citer, parmi les récents cas d’école et même s’il ne s’agit pas
d’une entreprise française, la mise en détention du patron de la filiale
Amérique du Sud de Whats’app au Brésil car sa société avait refusé de
livrer des informations à la justice. «
Le Risk Manager doit savoir anti-
ciper ces risques
», prévient Iouri Goloubtzoff, Responsable assurance
Lignes Financières chez Allianz Global Corporate & Specialty France.
Pour Baptiste Helbert, Financial Lines Underwriting Manager France/
Benelux d’Axa Corporate Solutions, l’entreprise cliente «
doit veiller à
travailler avec des assureurs de première ligne qui ne vont pas externaliser
les services importants tels que la gestion des sinistres
». À entendre les
différents acteurs, ces polices sont même devenues incontournables
pour attirer les nouveaux talents. «
Ce type de garantie fait partie du
package que les entreprises proposent à leurs dirigeants
», note Audrey
Descaves. Pour une grande multinationale, cela peut parfois concerner
des centaines de personnes.
LA SANTÉ FINANCIÈRE DE L’ENTREPRISE
ET LE PARCOURS DU DIRIGEANT SOUS LA LOUPE
La faculté de faire évoluer les couvertures est également un point
mis en avant : «
il y a des nouveaux cas liés aux évolutions des risques
comme le risque cyber
», souligne Iouri Goloubtzoff. Il rappelle ainsi
le cas de l’américain Target, victime d’une énorme cyber-attaque qui
a coûté son poste au PDG et une sérieuse atteinte à la réputation de
l’entreprise. Certains pays qui commencent à s’ouvrir mais sont encore
sous embargo comme l’Iran ou Cuba sont également un autre grand
défi pour les assureurs . «
Les sanctions sont toujours valables mais nous
avons des clients qui se rendent dans ces pays pour prospecter ou nouer
des contacts. Il nous faut trouver comment les accompagner
», précise
l’expert d’Allianz. Pour monter ces garanties, ces assureurs précisent
privilégier parfois le sur-mesure. «
Nous faisons alors des recommanda-
tions sur des pays bien spécifiques pour la mise en place de programmes
internationaux d’assurance et interrogeons nos clients davantage sur
certaines expositions où la législation locale peut être sensible
», précise
Baptiste Helbert. Iouri Goloubtzoff détaille le processus en cours chez
Allianz, axé en premier lieu sur la santé financière de l’entreprise :
«
d’abord nous regardons le bilan et le résultat annuel. Une entreprise
bénéficiaire a moins de risque de réclamations liés à sa gestion. Ensuite,
nous analysons la personnalité des dirigeants. Certains CV sont révéla-
teurs. Et puis bien sûr nous faisons une analyse de son activité et de ses
expositions à certains pays.
»
La position de l'AMRAE
L’analyse de Zaiella Aissaoui,
Présidente
de la Commission Responsabilités de l’AMRAE
Très cohérentes, les grilles démontrent que ce type de police
est devenu indispensable pour toutes les grandes entreprises.
Les Risk Managers et Directeurs des assurances doivent être
très vigilants car pour ce type de police, le détail est primor-
dial. L’objectif premier est l’indemnisation des conséquences
pécuniaires des réclamations des tiers. Mais dans les faits, les
garanties les plus importantes, sont les garanties accessoires,
principalement, les frais de défense. Le Risk Manager doit vrai-
ment faire attention à avoir une garantie « frais de défense »
libellée de façon très précise par rapport à la garantie principale
qui devient presque anecdotique.
Personne morale ou personne physique ?
Autre point d’importance à étudier : la prééminence entre per-
sonne morale et personne physique. Si les polices ont été conçues
à l’origine pour les personnes physiques, elles couvrent au-
jourd’hui les deux. Or l’articulation de ces clauses pose toujours
problème. Où doit-on d’abord affecter les frais de défense ? Les
dirigeants concernés veulent que les sommes soient d’abord af-
fectées à leur personne mais les instances (autorités judiciaires
ou administratives) préfèrent privilégier la personne morale. Il
faut s’assurer que la police édicte la règle et que ça soit clairement
mentionné. Car les montants en jeu, pour cette ligne peuvent être
vite épuisés surtout s’il y a un incident aux États-Unis. Le Risk
Manager doit être très vigilant sur l’insertion de ces clauses.
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°9 I
JUIN 2016
41
PRODUITS ET SERVICES