« Envisager la conformité comme
un vrai processus, voire un ensemble
de processus, permet de garantir que
cela fonctionnera dans le temps. »
Nicolas Dufour, Mutuelles UMC
Chez Bureau Veritas, cette démarche opérationnelle s’accompagne
d’actions de sensibilisation. L’un des points du programme de
conformité est de s’assurer que 100% des employés sont formés
au code d’éthique. «
Nous avons un relais auprès des RH pour faire
ce suivi et nous remonter un rapport trimestriel sur le nombre de
personnes formées. Dans le cas de non-formation, la raison doit être
explicitée
», insiste Anne-France Arnoux-Saugnac.
PARTIES PRENANTES ET SOUS-TRAITANTS :
LE MAILLON FAIBLE
Le drame du Rana Plaza et bien d’autres avant lui ont montré que les
atteintes à l’éthique et à la compliance étaient souvent le fait non pas
de l’entreprise elle-même mais de ses sous-traitants, de son écosys-
tème. Pour les entreprises internationales, «
c’est un des sujets les plus
sensibles et les plus complexes. L’entreprise demande à un tiers de faire
une partie de son activité. Il faut arbitrer entre déléguer suffisamment
et contrôler les prestataires d’un point de vue compliance. Aujourd’hui,
un contrôle initial est exercé au moment d’établir le contrat ou de le
renouveler. Nous avons un système de due-diligence basé sur les types
de risques, les activités déléguées, selon les pays, et au cours de la vie du
contrat, sur un droit de contrôle continu et d’audit, en corrélation avec
les activités concernées
», explique Dominique Laymand.
Sylvie Le Damany insiste auprès de ses clients pour la mise en
place de dispositifs permettant de juger les sous-traitants. «
Il faut
pouvoir attester que l’on s’est préoccupé du problème. C’est égale-
ment un sujet de traçabilité
». Bureau Veritas a établi une procédure
de sélection de ses sous-traitants comme le rappelle Anne-France
Arnoux-Saugnac : «
nous demandons à nos sous-traitants de signer
une déclaration au terme de laquelle ceux-ci s’engagent à respecter
notre code d’éthique. Aujourd’hui, nous ne les obligeons pas à se
former mais les y encourageons. Notre Direction Achats travaille à la
mise en place d’un package pour nos sous-traitants intégrant la ques-
tion de l’éthique mais aussi les règles de sécurité
».
Au final, conclut Nicolas Dufour, Responsable du contrôle interne
et de la Maîtrise des Risques des Mutuelles UMC (et membre de la
Commission Risk Management – Ressources humaines de l’AMRAE),
«
la conformité est un budget à part entière et pas uniquement un
budget exceptionnel alloué dans le cadre d'une mise en conformité.
Envisager la conformité comme un vrai processus, voire un ensemble de
processus, permet de garantir que cela fonctionnera dans le temps
».
LE COÛT DE LA FAUTE…
Non-conformité, fraude, corruption, entente illicite… Ces com-
portements quand ils sont découverts peuvent avoir des effets
catastrophiques pour l’entreprise et même amener à sa perte.
Ainsi Enron en 2001 mais aussi plus récemment Mitsubishi
Motors. Englué dans le scandale des tests de consommation
truqués, le constructeur nippon a vu sa capitalisation boursière
fondre de 40% en un mois. Affaibli, déconsidéré, il est deve-
nu une proie pour ses concurrents : le 12 mai dernier Renault-
Nissan annonçait l’acquisition de 34% de Mitsubishi Motors.
Les amendes peuvent concerner des organisations du monde
entier. Néanmoins, elles sont souvent administrées par la
justice américaine en vertu notamment de la loi d’extraterri-
torialité FCPA. Une situation qui doit amener les entreprises
non États-Uniennes à redoubler de vigilance et à être très ri-
goureuses dans la mise en place de leur plan de conformité. À
ceux qui voient dans cette situation des pratiques faussant la
concurrence, Sylvie Le Damany estime que «
ce comportement
a permis de faire sortir des affaires
». Et que cela doit pousser
les «
entreprises françaises notamment familiales à être plus
rigoureuses dans leur lutte contre la corruption
». Néanmoins,
le UK Bribery Act, dont les premières condamnations com-
mencent à tomber, et la loi Sapin 2 devraient rétablir un cer-
tain équilibre avec les États-Unis. Sans compter le nouveau
règlement européen sur les données personnelles où les en-
treprises fautives pourront se voir infliger une amende allant
jusqu'à 4% de leur chiffre d'affaires mondial !
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°9 I
JUIN 2016
20
DOSSIER
ÉTHIQUE ET CONFORMITÉ