la preuve des obligations
La réforme serait pour une
très large part la consolidation de solutions connues,
rendues plus intelligibles par leur réception dans une
norme écrite dans un français contemporain : le couple
de l’offre et de l’acceptation, le pacte de préférence, la
promesse unilatérale ou encore la durée des contrats
auront enfin les honneurs du code civil la créance
apparaîtra comme un bien et plus seulement comme un
lien dans le nouveau régime général des obligations.
Quelques innovations toutefois seront à l’origine d’une
évolution de solutions existantes.
Deuxi!mement parce que le proYet d¬ordonnance
améliorerait notablement l¬efficience de notre droit La
réforme s’inscrit résolument dans une perspective libé-
rale annoncée d!s l¬article s du nouveau Soustitre r
par une réception de la liberté contractuelle
chacun
est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir
son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme
du contrat dans les limites fixées par la loi
art rr{s al
r du proYet et une réaffirmation du consensualisme
art rrxr du proYet Bui dit contractuel dira encore
Yuste : le législateur refuse tout contr+le de principe
de l’équivalence des prestations : sauf exception donc,
dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équiva-
lence des obligations n’est pas une cause de nullité du
contrat (…)
art rrx{ du proYet Et ce libéralisme se
traduit par une foi renouvelée non seulement dans la
volonté commune mais dans la volonté unilatérale. À
l’instar de certains droits européens, le pouvoir de la
volonté unilatérale progresse au nom de la simplicité
et de la rapidité : celle-ci pourra tour à tour suspendre
par anticipation un contrat en cas d’inexécution mani-
feste ultérieure du cocontractant art rss{ du proYet
résoudre celui-ci à ses risques et périls (art. 1226),
fixer unilatéralement le prix des contratscadres à
exécution successive (art. 1163) ou d’entreprise (art.
1164), sous réserve naturellement d’un contrôle ulté-
rieur de l’abus.
Time is money
. Et la disparition - plus
formelle que réelle - de la notion de cause s’explique
par une exigence de sécurité Yuridique rétive à une
notion devenue trop pexible et imprévisible entre les
mains du Yuge
LA RÉFORME ENGAGÉE EST ÉQUILIBRÉE
Refusant le seul
business friendly
si cher aux pahs de
common law, le législateur a souhaité promouvoir des
solutions équilibrées et s’inscrivant dans une tradition
continentale qui a touYours fait cas de la protection
de la partie faible D¬o/ l¬affirmation d¬un devoir de
contracter et pas seulement d’exécuter de bonne foi
immédiatement après celui de liberté contractuelle ; le
droit français ne ferait ici que mettre en exergue une
trilogie de principes Directeurs largement communs
aux pays d’Europe : liberté, loyauté et sécurité contrac-
tuelle. Et l’aversion pour les déséquilibres contractuels
ultérieurs et imprévus conduira à une possible résilia-
tion Yudiciaire pour imprévision : en l¬absence d¬accord
des parties le Yuge pourra mettre fin au contrat mais
il ne pourra l’adapter sans avoir reçu pouvoir à cet
effet des contractants. Plus inopportunément, le choix
a été fait, en l’état, de généraliser la prohibition des
clauses abusives à l’ensemble des contrats suscitant
une véritable levée de boucliers lors de la consulta-
tion : il conviendrait de réserver cette prohibition aux
seuls contrats d¬adhésion par ailleurs définis dans le
proYet L¬admission de la violence économique appelle
les m"mes réserves tant sont pous ses contours
4ette réforme devra "tre conduite dans l¬année de l¬ha-
bilitation donc pour la mi-février 2016 et le secteur
des assurances ne pourra que s¬h intéresser Fne fois la
réforme stabilisée, il conviendra d’en mesurer l’impact
en particulier sur les contrats d¬assurance ?écessaire
utile et équilibrée, elle est attendue. Il conviendra
cependant que soient gommées certaines imper-
fections du proYet à commencer par la suppres-
sion peu compréhensible de la subrogation
conventionnelle consentie par le créancier…
Par Philippe Dupichot,
Professeur à l’École
de droit de la Sorbonne,
Senior Counsel de Gide
Loyrette Nouel
Richard Ghueldre
,
Avocat Associé de Gide
Loyrette Nouel, membre
du Comité scientifique
de l’AMRAE
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DE L’AMRAE
I N°5 I
JUIN 2015
47
VEILLE ET POSITION