MÉTIER RISK MANAGER
ZOOM SUR…
Par Aurélie Nicolas
Comment êtes-vous passé de Risk Manager à
Data scientist ?
DRXe]tXo`de de Uor\PtXo] Y¬PX todYodrb _rPtX`d
une approche quantitative des risques, même si
je me suis ensuite plus orienté vers la conduite
du changement et le management. Après plus
de 15 ans comme Risk Manager chez Lagardère,
j’ai souhaité me replonger dans les sciences
et j’ai effectué une thèse de mathématiques
à mi-temps. Dans la foulée, j’ai proposé au
Groupe, qui l’a accepté, de mener une mission
sur la valorisation des données, ce qui corres-
pondait parfaitement à ses besoins dumoment.
Je me suis alors rapproché du réseau innova-
tion du groupe. Mais pour un Risk Manager,
lP Rdltdre bRXe]tXo`de de QPbe ]¬ebt _Pb d]
prérequis pour exercer le métier ni appréhender
les risques inhérents aux données : numérisa-
tXo] dd trPePXl X]tellXVe]Re PrtXoRXelle rXb`deb
numériques, gestion d’une masse croissante
de données… Il y a de plus en plus d’outils qui
_er\ette]t de `dP]tXoer Reb rXb`deb bP]b "tre
un expert de la donnée. Un Risk Manager s’in-
téressant à ces sujets, peut très bien y arriver.
Quel usage le Risk Manager peut-il faire des
données à sa disposition ?
BdP]tXoer _er\et de RlPrXoer bP _e]b e et
aide à présenter une synthèse chiffrée pour
communiquer avec sa direction. Mais encore
faut-il avoir des données, pour pouvoir les
`dP]tXoer 4ellebRX bo]t do]] eb _Pr le
marché (prix, indices boursiers, prévisions
climatiques…), ou obtenues en interne par
l’entreprise comme par exemple si celle-ci
enregistre de nombreux sinistres.
Les Risk Managers ont toujours manipulé
des données mais ce qui change aujourd’hui,
c’est l’irruption de données massives qui
sont par exemple au cœur de l’activité des
GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon).
Très détaillées, elles peuvent servir à opti-
miser les process et à vendre plus et mieux
aux clients. Il n’y a pas de raison pour que ces
données ne servent pas aux Risk Managers. Le
Directeur général attend de son Risk Manager
une compréhension générique de ce qui se
passe et qu’il apporte sa compréhension et
sa méthodologie, d’abord sur des risques
rares et graves. Une culture quantitative des
données s’installe dans les entreprises et les
organisations, comme il y a eu la culture Web
et la culture technologique. Dès qu’elles ont
une décision à prendre, ces organisations
«
data driven
» ont recours à du testing, avec
2 avantages : cela rapproche la décision du
terrain et cela accélère la prise de décision.
Grâce aux données, il est devenu plus facile
de tester des choix opérationnels.
Quel est pour vous le principal risque lié aux
données aujourd’hui ?
Clairement, il s’agit à court terme du risque
d’intrusion informatique. La gestion des risques
informatiques est devenue une vraie guerre de
terrPX]. =¬X]tellXVe]Re PrtXoRXelle oUUre deb odtXlb
comme les modèles prédictifs de détection des
fraudes. À moyen terme, un monde de l’In-
ternet des objets où les capteurs sont partout,
où les voitures se conduisent toutes seules,
n’est plus le même monde, ce qui change
forcément la nature des risques opérationnels
mais aussi stratégiques.
Savoir où placer les capteurs parmi la masse
de données est donc une question centrale
du Risk Manager ?
Oui, exactement. La vision big data est un
empilement de signaux faibles. Il faut scruter
bo] bhbt!\e _odr Xde]tXoer leb dhbUo]RtXo]-
nements, et progressivement, améliorer la
précision. C’est le même principe que les
recommandations d’achat des moteurs de
reRWerRWe elleb bo]t podeb et X\_PrUPXteb
mais meilleures que si les recommandations
étaient faites au hasard, et elles s’améliorent
au fur et à mesure. Le big data, c’est toujours
des statistiques, mais des statistiques en
temps réel, et qui vont plus loin dans les
détails. Avec la profusion d’informations, on
récolte plus de signaux faibles. Même si on n’a
pas toujours une maîtrise des techniques, il
faut une vraie culture des données. La donnée
reconstruit ce que sont l’intuition et la direc-
tion d’entreprise.
«La donnée
reconstruit ce que
sont l’intuition
et la direction
d’entreprise. »
L’utilisation et l’analyse des données sont devenues une tendance de fond et une culture qui
s’impose progressivement au sein des comités de direction. Lamasse de signaux faibles apportés
par le
big data
rebat les cartes de la gestion des risques. Analyse d’Olivier Sorba, Directeur scien-
tio`ue du R seau innoeation du grou_e Lagardère et anRien Ar sident de [¬2MR2E
DUBIGDATAAURISKMANAGEMENT
BIO EXPRESS
Olivier Sorba, 58 ans, ancien élève
de l'École normale supérieure, membre
agrégé de l'Institut des Actuaires, a exercé
comme actuaire et ingénieur financier
au sein du groupe Caisse des Dépôts.
Il est ensuite entré à la Direction
des marchés de capitaux de la Caisse
nationale de Crédit Agricole, avant
de devenir, en 1995, Directeur général
de Lagardère North America.
De 2000 à 2015, il a été Directeur des
risques puis du contrôle interne de
Lagardère. Il a présidé l’AMRAE de 2003
à 2005, puis la Commission Scientifique
de l’Institut des Actuaires. Il est, depuis
2015, Directeur scientifique du Réseau
innovation de Lagardère.
Olivier Sorba,
Directeur scientifique
du Réseau innovation,
Lagardère
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°13 I
ÉTÉ 2017
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