MÉTIER RISK MANAGER
RETOUR D'EXPÉRIENCE
«
Après les attentats, nous avons connu une importante
désaffection sur nos villages en Turquie et au Maghreb,
et nous avons réduit la période d’ouverture de Djerba
»,
confie de son côté Morgane Pourchet, Directrice Risques
et Assurances du Club Med. «
Nous essayons d’optimiser
nos vols charters, qui évitent les correspondances dans les
capitales plus exposées et dans lamesure du possible, nous
faisons preuve de souplesse en proposant d’autres desti-
nations à nos voyageurs. Au total, notre chiffre d’affaires a
baissé de 30 à 40 % sur les destinations sensibles
».
DES ASSUREURS PLUS FRILEUX
ET PLUS REGARDANTS
Dans ce contexte particulier, les sociétés de loisirs et
d’événementiels se sont rapprochées de leurs assureurs.
Si les premières disposent généralement de contrats
d’assurance à l’année et n’ont vu pour l’instant que peu
de changements lors des renouvellements (parfois une
légère hausse de primes ou l’apparition de franchise),
les sociétés d’événementiel qui s’assurent de façon
temporaire, événement par événement, sont en revanche
confrontées depuis 18 mois à une réelle frilosité des assu-
reurs, qui ont considérablement durci leurs conditions de
souscription et n’ont pas hésité à augmenter leurs primes.
Les difficultés ne portent pas sur l’assurance des
dommages matériels en cas d’attentats sur
le site, réassurés par l’intermédiaire du
GAREAT. En revanche, pour couvrir
la RC organisateur (risques aux
tiers), les dommages immatériels
et les pertes d’exploitation, c’est
plus difficile. Et Olivier Porte de
confirmer : «
Depuis les attentats,
les assureurs sont plus réticents et
travaillent plus en co-assurance.
Pour les petits et moyens événements,
ils proposent des pleins de garanties
entre 3 et 10 millions d’euros. Au-delà,
nous montons des programmes d’assurance
mixte avec des assureurs londoniens
».
Il en est de même pour la garantie annulation d’évé-
nements (intempéries, incendie, lieu indisponible…),
dans laquelle les assureurs excluent désormais l’attentat
et ne le proposent qu’en «
extension de garantie
», afin
d’analyser chaque événement au cas par cas. La garantie
annulation est très prisée par les organisateurs d’événe-
ments, autant pour ne pas imputer leur bilan que pour
soigner leur image de marque. «
Avec les attentats, les
organisateurs ont pris la mesure de l’intérêt de souscrire
une assurance annulation
», confirme l’UNIMEV. «
Mais
le marché souffre actuellement d’un effet ciseau (plus de
demande mais moins d’offre de la part des assureurs en
retrait). La garantie ”Attentat” qui était souvent ”France
entière” ne s’applique désormais plus que dans un péri-
mètre restreint, allant de 500 m à 50 km autour du lieu
de l’événement assuré. Certains assureurs continentaux
ou du marché anglais continuant toutefois de la proposer
sur la France entière, à des tarifs forcément plus élevés
»,
précise Olivier Porte. La date d’annulation par rapport
à la date de l’événement joue également sur la couver-
ture, tout comme le fait déclencheur de l’annulation de
l’événement, qui ne doit pas être le fruit d’une décision
unilatérale de l’organisateur mais faire suite à un retrait
d’autorisation par les autorités publiques, comme cela a
été le cas après les attentats du Bataclan.
LES PLANS DE GESTION DE CRISE
À L’HONNEUR
Néanmoins, une des conséquences «
positives
» du
contexte terroriste actuel est d’avoir remis à l’honneur
les plans de gestion de crise, souvent délaissés
ou informels. Ceux qui n’en avaient pas se
sont mis à y réfléchir, tandis que les
plus avancés en ont profité pour les
réajuster ou les compléter par des
plans de continuité et une forma-
tion spécifique du personnel.
«
Au Club Med, la sécurité est un
préalable incontournable syno-
nyme de sérénité et tranquillité
d’esprit. Nous travaillons avec les
autorités locales, les ministères
des affaires étrangères et le RAID, en
effectuant des audits sécurité réguliers
sur nos sites. Depuis la vague d’attentats,
nous avons renforcé nos plans de gestion de crise, en
partenariat avec Europ Assistance
», confirme Morgane
Pourchet. La plupart des professionnels reconnaissent
ainsi que les plans de gestion de crise sont désormais
plus intégrés, avec au final pour tous plus de synergies
entre les acteurs, les assureurs, les assisteurs et les
pouvoirs publics.
Morgane Pourchet,
Directrice Risques
et Assurances, Club Med
LE CHIFFRE
Le coût de l’assurance
annulation pour un événement
d’un million d’euros est passé
de 1 % du budget
à
2
ou
3 %
depuis
les attentats.
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ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°11 I
DÉCEMBRE 2016