Cette politique de prévention contre les risques de corruption passe
par la mise en place de diverses mesures :
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émettre un code de conduite à l’attention des salariés ;
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instaurer un dispositif d’alerte interne permettant le recueil de si-
gnalements émanant des salariés, des filiales directes et indirectes et
des clients et fournisseurs ;
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réaliser une cartographie des risques par secteur d’activité et par
zone géographique, en fonction des principaux clients, fournisseurs
et intermédiaires ;
❱
mettre en place des procédures de contrôle comptable ;
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former les salariés les plus exposés aux risques ;
❱
contrôler et évaluer en interne les mesures mises en œuvre.
En outre, les entreprises reconnues coupables d’atteintes à la probité
pourront éventuellement être condamnées à l’obligation de vigilance
du nouvel article L. 23-11-2 du Code du commerce pour une durée de
cinq ans au plus, sous le contrôle de l’Agence.
La mise en place de ces mesures entraînera donc une augmentation
des coûts administratifs. En outre, le responsable conformité au sein
de l’entreprise devra veiller à la mise en œuvre de ces mesures, qui sera
précisée par décret en Conseil d’État.
Les entreprises devront donc veiller à coordonner les recommanda-
tions de l’Agence et les obligations de vigilance mises à leur charge par
les nouveaux articles L. 23-11-1 et s. du Code de commerce, en actuali-
sant dès que de besoin leur contenu et en impliquant tous les salariés.
PRÉVENIR LE RISQUE DE TRAFIC D’INFLUENCE D’AGENT
PUBLIC ÉTRANGER
Le projet de loi instaure un délit de trafic d’influence d’agent public
étranger, afin de sanctionner le fait pour une personne physique ou
morale de payer un agent public étranger afin qu’il use de son influence
réelle ou supposée auprès d’une autre personne dans le but d’obtenir
des emplois, des marchés ou toute autre faveur.
L’entreprise devra donc réduire ce risque en proposant des formations
à ses dirigeants et commerciaux les plus à même de commettre ce genre
de délit, en fonction de la cartographie des risques.
UNE INNOVATION : PERMETTRE AUX PERSONNES
MORALES DE TRANSIGER AVEC LA JUSTICE
Le projet de loi propose une innovation anglo-saxonne : la transac-
tion judiciaire. Les entreprises à l’encontre desquelles une enquête
pour délit d’atteinte à la probité est ouverte pourront transiger avec le
Parquet afin de ne pas être condamnées.
L’amende pénale pourra être prononcée dans la limite de 30 % du
chiffre d’affaires moyen annuel calculé sur les trois dernières années.
L’entreprise pourra être soumise, pour une durée maximale de 3 ans, à
un programme de mise en conformité.
La transaction sera validée par le juge au cours d’une audience pu-
blique, et publiée. Il est important de noter que les personnes morales
ne pourront pas être parties à la transaction, et pourront donc toujours
être poursuivies.
Les entreprises auront donc intérêt à évaluer l’opportunité d’une telle
transaction en termes financier et de réputation.
DES RISQUES À ANTICIPER POUR L’ENTREPRISE
Ce texte crée de lourdes obligations en matière de vigilance dans la
lutte contre la corruption, afin d’inciter les entreprises à devenir plus
transparentes pour encourir moins de risques de réputation.
Il convient donc de créer au sein de l’entreprise des postes spécifiques
sur ces questions d’alerte et de vigilance. Seuls des outils élaborés avec
le management et les opérationnels, adaptés en fonction de l’évolution
des recommandations et des pratiques, se révéleront à terme efficaces.
Il sera opportun pour beaucoup d’entreprises de réexaminer leur couver-
ture assurantielle à l’aune de ce nouveau cadre légal «anti-corruption»,
sachant toutefois que le droit pénal n’autorise pas une personne physique
ou morale à se garantir contre ses propres infractions.
L’ANALYSE DE L’AMRAE
Les entreprises internationales ont déjà mis
en place des processus de prévention en la
matière car des législations anglo-saxonnes
(UK Bribery Act & FCPA pour les USA), avec une
dimension extraterritoriale, existent depuis
plusieurs mois sur ce thème.
C’est avec ces exemples «vécus» que l’on mesure l’efficacité
d’une approche par les risques et donc l’apport méthodologique
et la place légitime du Risk Manager sur ces sujets. En effet, si
elles sont justifiées (car on ne peut qu’approuver la lutte contre
la corruption), les obligations à la charge des entreprises sont de
plus en plus lourdes en la matière. De premières mesures «aisées»
peuvent être rapidement mises en place (code de conduite,
dispositif d’alerte…), mais un véritable programme est long (et
coûteux) à mettre en œuvre. Indépendamment des considérations
de ressources, il doit, pour être efficace, être adapté, ajusté au
mieux au profil de l’organisation. Il est donc essentiel de raisonner
par priorités, ce qui rend incontournable l’analyse de risques qui
seule permet des réponses proportionnées.
Rappelons que ce fut le thème de l’un des ateliers des Rencontres
2014 qui insistait sur la nécessité de rattacher ces dispositifs au
plus haut niveau du management.
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°10 I
SEPTEMBRE 2016
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VEILLE ET POSITION