APRÈS TIANJIN : LA GESTION
DES SINISTRES EN CHINE
Pour analyser les explosions et les indemnisations au port de Tianjin,
la Commission Dommages aux biens de l’AMRAE a tenu une session spéciale
le 22 septembre dernier avec des experts et assureurs venus de Chine.
M
ercredi 12 août 2015, port de marchan-
dises de Tianjin. Une explosion assour-
dissante se fait entendre à 23 heures.
Dans une zone de stockage de véhicules
d’import et de conteneurs renfermant des
matières hétérogènes, à forte valeur économique, les
pompiers arrivent rapidement pour éteindre l’incendie.
Et arrosent sans le savoir des produits chimiques qui, au
contact de l’eau, provoquent une seconde explosion.
Bilan : 123 morts, 167 blessés, 13 disparus, et une
catastrophe écologique due à la dispersion de produits
chimiques.
Économiquement, les conséquences sont lourdes, puisque
Grégoire Lancner, Responsable du Foreign desk au sein de
PING’AN (compagnie chinoise d’assurances), estime à 10
milliards de dollars le total des dégâts. «
Seulement 1/7
e
des marchandises étaient assurées, on ne sait pas si celles
qui ont été endommagées l’étaient
», précise-t-il.
CULTURE DIFFÉRENTE =
GESTION DIFFÉRENTE DES SINISTRES
Venu de Pékin, Grégoire Lancner apporte aux auditeurs
son regard d’assureur immergé dans les affaires et la
culture chinoises. Il souligne «
la difficulté à être informé
des polices Stand Alone : les grands groupes doivent
inclure ces polices dans leurs programmes internationaux,
afin que l’apériteur et le courtier global soient en contact
régulier avec leurs homologues locaux
».
Autre spécificité locale, le fonctionnement du loss
adjuster. «
En Chine, il se prononce sur la couverture
assurantielle et doit donc avoir d’importantes capacités
d’expertise
».
Enfin, Grégoire Lancner explique que «
les Chinois aiment
entretenir des relations d’amitié, même dans le business
».
Avoir de bons rapports avec son assureur améliore la
vitesse de traitement d’un dossier en cas de sinistre.
GÉRER CORRECTEMENT L’APRÈS-TIANJIN
Face à la volonté du gouvernement chinois de limiter la
contamination, la vigilance est de mise. «
La preuve de
la non-contamination de ses produits revient au client.
Entourez-vous de bons experts, et faites établir des certificats
de conformité pour prouver votre bonne foi en cas de contrôle
surprise
», prévient Grégoire Lancner. «
En cas de doute,
vos marchandises sont mises en quarantaine… et peuvent
être détruites par l’État, sans que vous ayez un quelconque
recours
». Un Risk Manager averti en vaut deux.
Grégoire Lancner,
Responsable du Foreign
desk, PING’AN
L’ÉCLAIRAGE DES EXPERTS DU GROUPE ERGET
Le Groupe Erget : de capitaux privés, il est un spécialiste de l’expertise pour le compte des compagnies
d’assurance, des risques de responsabilité civile, des risques techniques et des risques de construction.
Jacques Le Goff revenait sur la géographie du lieu et le souffle de l’explosion. Pour lui, le fait que certains
bâtiments aient été désagrégés dans le rayon de l’explosion, contrairement à d’autres, pose la question
«
d’une explosion interne de ces structures, peut-être due à un stockage de produits chimiques
». L’expert doute
que du gaz d’acétylène soit responsable de la seconde explosion. «
Un gaz ne forme pas un cratère en explosant,
alors qu’un solide posé au sol, si
». Et revient sur le nitrate d’ammonium, qui peut exploser sans oxygène… comme dans
l’usine AZF de Toulouse.
Philippe Gautier a résumé l’histoire du port de Tianjin, «
dont la croissance exponentielle est anarchique depuis 15 ans, et
qui est plus important que la plupart des ports européens
». Son estimation financière du sinistre diffère parfois de celle
de Grégoire Lancner : «
60 millions de dollars de dégâts sur les conteneurs, 68 millions de dollars pour les marchandises
stockées, 1,5 milliard de dollars de véhicules hors d’usage, pour un sinistre global d’environ 4 milliards de dollars
». Appelé
récemment à Marseille pour examiner un conteneur provenant de Tianjin, l’expert pointe aussi le fait qu’aucun embargo
sur les produits venant de ce port n’est observé malgré des risques évidents de contamination.
Jacques Le Goff
Philippe Gautier
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DE L’AMRAE
I N°7 I
DÉCEMBRE 2015
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ACTUALITÉ DE L’AMRAE
ÉVÉNEMENTS