ÉTAPE 2 : SIMPLIFIER ET COMMUNIQUER
Autre action menée par Anne Piot d’Abzac :
simplifier la méthodologie, notamment les
échelles d’impact et de maîtrise qui compre-
naient trop de niveaux, et réduire le nombre de
critères. «
Jusqu’alors les critères étaient clas-
siques : impact, probabilité, criticité et maîtrise.
Nous avons simplifié en ne gardant qu’impact
et maîtrise, tout en prenant en compte les
éléments de probabilité dans la méthodologie
»,
explique la Risk Manager, convaincue que l’on
peut raisonner uniquement en termes d’impact
financier, bien qu’elle ait souhaité conserver
les impacts de réputation et humain.
Parallèlement à cette nouvelle approche,
Anne Piot d’Abzac a lancé une newsletter, sous
forme de revue de presse, axée sur les sujets à
forts enjeux pour l’industrie pharmaceutique.
«
Cette démarche a facilité l’appropriation de
la culture du risque, notamment auprès de la
population commerciale du Groupe »,
ajoutant
que la valeur ajoutée de son métier consistait
à
« toujours être en support pour nourrir les
réflexions qui permettront de prendre les bonnes
décisions stratégiques.
»
LA VALEUR AJOUTÉE DE L’ERM
«
Unmédicament nécessite enmoyenne 10 années
de recherche pour un investissement global moyen
estimé à 1 milliard d’euros. C’est une indus-
trie de long terme
», rappelle la Directrice des
Risques. En médecine de spécialité, la stratégie
du Groupe consiste à se focaliser sur des activités
thérapeutiques de niche, directement et via des
partenariats (rachats ou licences) ; le système
de Due Diligence est très poussé au sein d’Ipsen.
«
Nous sommes impliqués très en amont surtout
sur la partie assurances. Les experts des autres
directions transverses (R&D, médical, juridique,
E&C, qualité, RH, finance…) bordent également
leurs risques.
»
Les facteurs de risques liés à l’activité sont
nombreux. Le risque produit étant dans l’ADN
du Groupe de par ses activités, l’apport de la
démarche ERM porte donc sur les autres types de
risques, tels que les risques propres au groupe,
à son organisation, à son empreinte géogra-
phique, ou ceux liés à l’industrie pharmaceu-
tique, en passant par les risques juridiques,
financiers, industriels ou liés à l’environnement.
Chaque risque majeur identifié est géré sous la
responsabilité directe d’un membre du ComEx.
DOMMAGE ET RC PRODUITS
Aux côtés d’Anne Piot d’Abzac, Florence Mahoux-
Boivin pilote le pilier assurances du dispositif
de gestion des risques, dont les deux grands
domaines sont le Dommage et la RC produits.
«
L’assurance Dommages et pertes d’exploita-
tion est clé. En cas de sinistre majeur, au délai
de reconstruction du site de production s’ajou-
terait celui lié à la validation/qualification des
bâtiments, équipements et installations. Dans
l’hypothèse de la reconstruction ou de la réinstal-
lation sur un nouveau site, il faut en outre prévoir
la mise à jour des dossiers d’enregistrement,
pays par pays. La durée totale de ces validations
réglementaires peut donc s’étendre sur plusieurs
années
». La prévention est par conséquent un
axe prioritaire. La couverture maximale a été
fixée à 750 millions d’euros par sinistre.
L’assurance RC produits est évidemment tout
aussi importante pour l’activité et repose sur
«
des relations de long terme avec nos parte-
naires assureurs qui impliquent transparence
et partage d’informations, notamment via des
visites de nos sites de R&D et de production.
»
Une partie du programme de RC produits est
financée par l’intermédiaire d’une « captive »
hébergée au Luxembourg.
OBJECTIF : ALIGNER
LES DÉMARCHES DE RISQUES
La Direction des risques échange très régulière-
ment avec de nombreuses directions notamment
Audit interne, Éthique et Compliance, Qualité,
HSE, afin que toutes ces démarches de gestion
des risques soient alignées et cohérentes. «
À force
d’œuvrer à ce que la culture du risque soit intégrée à
tous les niveaux du groupe, à terme, il n’y aura peut-
être plus de Risk Manager. Cela signifiera que le
groupe aura atteint une vraie maturité en termes de
gestion de risques.
» Quant à savoir si la Directrice
des Risques souhaite se rapprocher de la direction
générale, elle déclare que «
je trouve plus efficace,
notamment en termes d’accès à l’information,
d’être rattachée à une fonction support
».
3 QUESTIONS À
François Garnier,
Vice-président éxécutif,
Directeur juridique du
Groupe Ipsen
Comment expliquer le rattachement
récent de la fonction Risk Management
à votre Direction ?
Notre industrie évolue dans un environne-
ment extrêmement réglementé, la fonc-
tion juridique a donc toujours été perçue
comme étant éminemment stratégique
en première ligne quant aux risques.
Nous devons aujourd’hui être en mesure
d’identifier l’ensemble des risques inhé-
rents à notre activité pour les présenter à
notre gouvernance et proposer des plans
de gestion pour en limiter l’impact. Par
ailleurs et face à l’émergence de risques
nouveaux (compliance, réputation…), le
Comité d’audit a accru sa vigilance. Un
travail facilité quand une direction dédiée
est clairement identifiée.
Comment a évolué la fonction risque dans
le secteur pharmaceutique ?
Cette fonction a fait son apparition assez
récemment, il y a 8 ou 10 ans. Avant elle
n’existaitpascarlerisqueétaitgéréàlafois
par la finance, le juridique ou lemédical. La
pharmacie s’est donc approprié cette fonc-
tion émergente de Risk Management assez
naturellement. Aujourd’hui celle-ci s’est
fédérée, animée et professionnalisée et a
vocation, à l’instar de la fonction juridique,
à être une fonction support clé et d’aide à
la réflexion stratégique de l’entreprise.
Qu’attendez-vous de cette fonction au
sein du Groupe d’Ipsen ?
Qu’elle réponde, à la fois à nos obligations
de reporting des risques auprès du Conseil
d’Administration et du Comité d’Audit et
qu’elle interagisse avec l’ensemble des
acteurs de l’entreprise, le but étant de les
amener à réfléchir, sur le plan stratégique
et non plus opérationnel, sur le manage-
ment global de leurs risques.
QU’ATTENDEZ-VOUS DE L’AMRAE ?
Depuis mes débuts dans ce métier du
risque, l’AMRAE a été une formidable
école, un lieu privilégié d’échanges avec
mes pairs sur les sujets de fonds et sur la
façon de les aborder, de les traiter.
Dans le domaine de la formation, je suis
très heureuse aujourd’hui de pouvoir
contribuer à lui donner la place qui est
légitimement la sienne, celle de référence
incontestée en matière de formation
professionnelle en Risk Management.
ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE
I N°9 I
JUIN 2016
7
PORTRAIT