N°43 I HIVER 2024-25 DOSSIER \ 27 multinationales placent leurs risques dans des conditions acceptables, essentiellement grâce à leurs captives, de plus en plus fréquentes dans le secteur. Les acteurs de taille moyenne ont plus de mal à s’assurer », détaille Laurent Belhout. « Pour trouver des solutions, le courtier va travailler le plus en amont possible avec son client afin d’envisager des solutions alternatives de transfert de risques », reprend Jean-Christophe Lapeyre. Des solutions qui se situent souvent à l’étranger, aux Lloyd’s de Londres bien sûr, mais pas seulement. Les Managing general agents (MGA) et les coverholders (agences de souscription) ont plus que jamais le vent en poupe : en négociant des délégations de souscription avec des assureurs étrangers bien implantés sur leur marché historique, ils leur permettent de mettre un pied sur le marché français à moindres frais. Et répondre aux besoins des PME françaises pour couvrir leurs risques complexes, moyennant une prime élevée. « Nous sommes broker du Lloyd’s depuis peu et avons fait l’acquisition d’un MGA, Dune, afin d’élargir notre capacité de réponses à nos assurés », témoigne Sébastien Lenne de Verspieren. L’assurance de personnes sous les radars Le capital humain est particulièrement sous les feux des projecteurs cette année. Avec la hausse des frais médicaux et le désengagement progressif de la Sécurité sociale, qui se traduit par un transfert programmé vers les mutuelles et les entreprises, le marché de l’assurance santé va se renchérir. D’autant que la sinistralité se dégrade et que les réassureurs maintiennent leur pression. « En assurances de personnes, les statistiques permettent déjà de calculer les tarifs et les dérives dans le futur de façon objective. Aucun assouplissement n’est en vue sur ce segment », prévient Laurent Belhout. Même vision chez Rachel Guibert, directrice des assurances du groupe Publicis : « Le contexte politique en France crée des incertitudes en assurances de personnes : la dérive médicale projetée en 2025 est actuellement estimée entre 6 et 10 %. En prévoyance, l’augmentation des risques psychosociaux et l’allongement des arrêts de travail touchent désormais toutes les générations y compris les plus jeunes. Au niveau mondial, la tendance globale moyenne d’augmentation des frais médicaux s’élève à 10 %. » Relation bi ou tripartite ? Dans ce contexte d’assouplissement du marché, les trois acteurs de la gestion des risques d’entreprise sont-ils sur la même longueur d’onde ? « Cette relation tripartite reste exigeante dans un contexte économique difficile. Elle se doit d’être partenariale et basée sur le partage, notamment des plans de prévention », estime Florence Louppe. « La communication est devenue plus que jamais essentielle et la bonne circulation de l’information dans le triangle courtier, client, assureur est un facteur clé de succès pour une appréciation juste du risque à transférer », abonde Sébastien Lenne. Pour Aon, il s’agit avant tout d’une relation bipartite entre le client et l’assureur, organisée et régulée par un troisième acteur, le courtier, qui joue le rôle de négociateur. « Nous n’avons aucun état d’âme à ce que le risk manager et l’assureur aient une relation directe et transparente. C’est souvent très constructif car ils comprennent ainsi leurs contraintes respectives », complète Grégory Allard, qui croit beaucoup au rôle que l’assureur peut jouer dans le soutien aux nouvelles filières innovantes. Et d’adresser en chœur un message aux risk managers : « Soyez transparents avec votre courtier, dialoguez, anticipez, afin d’obtenir les meilleurs résultats sur un marché qui reste difficile ». L’AVIS DE L’AMRAE François Beaume et Alain Ronot, viceprésidents de l’Amrae. Le retour à la stabilité est amorcé. Sur plusieurs segments de marché, la tendance est à l’accalmie, notamment en responsabilité civile (RC professionnelle, RC après livraison, responsabilité environnementale), sur les lignes financières mais aussi sur les dommages aux biens, à certaines conditions. Cette rupture avec un cycle haussier particulièrement contraignant pour les entreprises assurées se double d’un regain d’appétit des assureurs pour des risques comme le cyber, par exemple. L’accalmie perceptible en 2024 ne doit toutefois pas faire oublier les sujets majeurs sur lesquels les risk managers devront être vigilants. Dans un contexte géopolitique qui se complexifie de jour en jour, le débat sur les clauses sanctions doit plus que jamais s’ouvrir entre assureurs, courtiers et assurés, tout comme celui des exclusions guerre, par exemple. Les risk managers auront donc encore un rôle majeur à jouer pour faire évoluer les pratiques de marché.
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