ATOUT RISK MANAGER N°30

ATOUT RISK MANAGER N°30 I AUTOMNE 2021 51 Veille et position Une réduction systématique de la prise de risque Enfin, si beaucoup d’organisations freinent des quatre fers, c’est qu’il y a aussi un problème mathématique : à trop cadrer son appétence aux risques, l’entreprise risque la frilosité. « L’expérience montre que plus on définit son appétence, plus on la réduit : le collectif se fait peur », explique Gérard Payen. En clair ? Prenons l’exemple d’une entreprise qui – instinctivement - accepte une prise de risque de l’ordre de 100 millions d’euros dans le cadre d’une acquisition. Si ce montant doit être indiqué noir sur blanc et soumis à l’autorisation de nombreux responsables, le consensus final risque d’être nettement moins élevé que les 100 millions d’origine… « C’est quasi- mathématique : une formalisation soumise à un examen excessif conduit à davantage de prudence. On l’a d’ailleurs vu dans le monde bancaire : depuis la réglementation sur l’appétenceauxrisques,lesinstitutionsfinancières ont réduit leur prise de risque, ce qui était l’un des objectifs du régulateur », détaille Gérard Payen. Sans oublier l’aspect indécent qu’aurait la formalisation d’une «appétence» aux risques sur certains sujets. On comprend donc que le flou peut avoir du bon… Reste que la pression risque d’aller croissant. « Une entreprise peut très bien vivre sans définir son appétence aux risques mais mon sentiment est que, à terme, les parties prenantes de l’entreprise - collaborateurs, investisseurs, mais aussi les ONG - vont de plus en plus exiger que les entreprises déclarent publiquement leurs niveaux d’appétences aux risques », estime Philippe Noirot. Et, soyons clairs : une fois engagée, il ne sera plus possible de faire machine arrière. n À noter L’édition 2020 du Coso sur l’appétence au risque https://www.coso.org/Documents/ COSO-Guidance-Risk-Appetite-Critical-to- Success.pdf Thought Leadership in ERM RISK APPETITE– CRITICAL TO SUCCESS Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission U S I N G R I S K A P P E T I T E TO T H R I V E I N A C H A N G I N G WO R L D The information containedherein isof ageneralnature andbasedon authorities that are subject to change.Applicabilityof the information to specific situations shouldbedetermined through consultationwith yourprofessional adviser, and thispaper shouldnotbe considered substitute for the servicesof such advisors,nor should itbeused as abasis for anydecisionor action thatmay affect yourorganization. By FrankMartens | Dr.LarryRittenberg Philippe Noirot, administrateur de l’AMRAE, directeur adjoint du Risk Management d’Orange Un sujet majeur pour les administrateurs S’il intéresse au premier chef les directeurs des risques, le sujet de l’appétence aux risques constitue aussi un enjeu majeur pour les administrateurs. L’Institut Français des Administrateurs (IFA) s’est d’ailleurs penché sur le sujet à plusieurs reprises. Tout d’abord en 2009, avec «Rôle de l’administrateur dans la maîtrise des risques» (IFA – AMRAE – PwC-Landwell). Puis, en 2015, lorsque l’Association a constitué un groupe de travail ad hoc, autour de Louis Gallois, alors président du Conseil de surveillance de PSA Peugeot Citroën. Le groupe avait pour objectif de «mieux cerner, au sein des conseils, les risques que les organisations sont prêtes à accepter au regard de leur stratégie et de mesurer l’alignement des parties prenantes» . Ses conclusions ont été détaillées dans un rapport intitulé «Risk appetite» publié en 2016. Il y apparaît que la réflexion sur l’appétit aux risques a pour bénéfice de «réhabiliter la prise de risque dans l’entreprise, mais aussi d’aligner les visions du conseil d’administration et du management et enfin d’améliorer la pertinence des incitations et la cohérence des comportements face aux opportunités et aux risques dans l’entreprise» . « Toute communication sur les risques à destination de l’extérieur doit être très finement mesurée, afin que l’on ne puisse pas reprocher à l’entreprise de s’engager sans mettre en face un dispositif de gestion des risques adapté. » Sylvie Le Damany, Avocate