ATOUT RISK MANAGER N°30
ATOUT RISK MANAGER N°30 I AUTOMNE 2021 49 Veille et position lesquelles nous avons tenté de formuler le niveau d’appétence. Les travaux ne sont pas finis, rien n’est encore précis ni validé : nous pouvons dire que nous en sommes encore à l’étape du « brouillon ». De fait, dans de nombreuses entreprises, les administrateurs sont très attentifs à la prise de risque liée à leurs décisions, sans que la formalisationde l’appétence ne leur ait semblé, jusqu’à présent, dépasser les autres priorités dans l’agenda du Conseil» , explique Philippe Noirot. Chez Ipsen, l’appétence aux risques a pris la forme d’un tableau, où s’affichent trois niveaux de prise de risque. « Il y a d’un côté les risques qui constituent des opportunités d’affaires : nous les acceptons avec un niveau de contrôle plus ou moins important. Ensuite, il y a les risques qui ont trait aux actifs majeurs, que nous contrôlons de très près. Enfin, certains risques sont « non négociables : nous n’avons aucun appétit et les refusons formellement. Il s’agit notamment des sujets liés à l’éthique ou à la santé. Même s’il est encore très général, ce tableau nous sert de point d’appui pour établir nos cartographies, travailler avec les opérationnels, ou prendre des décisions stratégiques. Si l’on constate par exemple qu’une opération ne s’inscrit pas dans le cadre de l’appétit aux risques qui a été défini, nous allons réagir, soit en changeant le niveaudecontrôleouennousdésengageant…» , illustre également Anne Piot d’Abzac. L’officialisation de lignes implicites De fait, nombreux sont les arguments en faveur d’une définition claire de son appétence aux risques : tant pour le contrôle de ces derniers, que pour la mise en œuvre de sa stratégie ou en matière de gouvernance. « Se poser la question de l’appétence aux risques, c’est pour le dirigeant reconnaître que la prise de risque est utile et nécessaire, mais qu’il faut avancer en connaissance de cause », souligne un professionnel. En effet, à chaque niveau d’appétence doit correspondre un niveau adapté de contrôle. « Si le tableau d’appétence aux risques montre que, sur un sujet donné, le niveau de contrôle souhaité n’est pas atteint, les managers auront des arguments pour obtenir de nouveauxmoyens », détaille Anne Piot d’Abzac. L’outil peut ainsi servir à définir ses niveaux de franchises et donc ses primes d’assurances, mais aussi à obtenir des moyens de prévention supplémentaires, par exemple face au risque cyber, ou encore à imposer certaines règles. « En établissant, noir sur blanc, qu’aucun risque nepeut êtrepris enmatièred’éthique, l’entreprise donne de réels moyens aux collaborateurs en chargede la conformité », illustre un responsable des risques. Un tableau d’appétence aux risques constitue aussi une grille de référence dans la prise de décision. « Il y a toujours des choix à faire dans une entreprise, et les dirigeants sont confrontés à des questions de priorisations en permanence. L’expression de l’appétence au risque permet de prendre les décisions les plus en accord avec ses priorités », juge Gérard Payen. La démarche permet aussi d’aligner les objectifs au sein de l’entreprise. « Une perte d’un million d’euros peut être vue très différemment au siège de l’entreprise et dans une petite filiale : en définissant précisément le cadre de la prise de risque, on réaligne les objectifs », complète Gérard Payen. Même au plus haut niveau : au seinduComex, où se côtoient des personnalités différentes. « En l’absence de document écrit et précis, il peut y avoir de réelles divergences d’appréciation, même au sein du comité exécutif. Ce manque de vision commune peut avoir pour conséquence, dans certains cas, l’échec d’un projet… », prévient Gérard Payen. Enfin, en permettant de définir clairement les limites de l’action de chacun, la formulation de l’appétence aux risques participe à la mise en place d’une bonne gouvernance. Au niveau des managers, tout d’abord. « En définissant la liberté d’action des opérationnels, l’appétence aux risques leur confère le pouvoir d’agir, en pleine responsabilité, dans les bornes prédéfi- nies. C’est rassurant et très protecteur : dans la mesure où une décision est conforme au cadre « Beaucoup d’organisations américaines ont établi leur «risk appetite statement » alors qu’en France, l’appétit aux risques n’est en général ni formalisé, ni centralisé. On peut dire que la maturité semble assez faible. » Gérard Payen, Administrateur de l’AMRAE
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