ATOUT RISK MANAGER N°18

DOSSIER LA RSE, PLUS QUE JAMAIS DANS LA LIGNE DE MIRE DES RISK MANAGERS L ongtemps réservée à des idéalistes, la notion de RSE a fait son chemin et apparaît désormais comme une tendance majoritaire, non seulement dans les attentes citoyennes mais aussi auprès des actionnaires, des cabinets de conseil en stratégie qui murmurent à l’oreille des dirigeants et au sein même des conseils d’administration des entreprises. Selon la taille de l’entreprise, son secteur d’activité ou son exposition à l’international, la RSE prendra des orientations différentes : plus axée vers l’environnement pour les secteurs industriels, elle sera surtout centrée sur les droits humains dans les secteurs à fort besoin de main d’œuvre comme le textile… « Sous l’étiquette RSE, on peut trouver beaucoup de choses » confirme Anne Piot d’Abzac, Directrice des risques d’Ipsen et Secrétaire générale de l’AMRAE. Or lorsqu’on parle de RSE, il est important de savoir ce que l’on place derrière (voir encadré). PLUS QU’UNE MODE, UN CHANGEMENT DE PARADIGME « Le risque principal en matière de RSE pour une entreprise est de ne pas la prendre en compte dans sa stratégie et dans l’évaluation de ses risques » résume d’entrée Xavier Guizot, Directeur Risks & Compliance du groupe Carrefour. «Une entreprise qui ne se préoccuperait pas de la RSE courrait un sérieux risque » confirme Anne Piot d’Abzac. C’est en partant de ce constat que les Risk Managers ont pris le sujet à bras le corps il y a quelques années et qu’ils sont aujourd’hui particulièrement sensibilisés à cet enjeu de taille. Mais deux éléments forts sont venus récemment amplifier la donne. « La RSE est l’aboutissement de réflexions qui sont menées depuis longtemps, mais elle prend aujourd’hui une ampleur différente dans le cadre nouveau de « l’entreprise étendue », qui intègre l’ensemble de son écosystème : fournisseurs, partenaires, clients…» explique la Secrétaire générale de l’association. « On assiste au formidable courant actuel qui est de revenir à la mission première d’une entreprise, qui ne serait pas uniquement de faire du profit. Le profit serait un moyen et non une fin, et l’entreprise doit assumer sa responsabilité à l’égard de tous les acteurs qu’elle embarque dans son parcours ». Un avis que pa r tage Stéphanie Canino, Risk Manager des Branches Minières chez Eramet : « Les risques liés à la RSE ne sont pas nouveaux : dès les premières cartographies des risques du Groupe, ils y tenaient une place importante, en raison des interactions fortes avec les territoires sur lesquels un groupe industriel et minier comme Eramet opère. Ce qui change, ce sont les attentes des parties prenantes, de plus en plus fortes, que ce soit du côté des citoyens, des clients comme des autorités. Aujourd’hui plus que jamais, les entreprises ont pris conscience LES ENTREPRISES ATTENTIVES AUX RISQUES EXTRA-FINANCIERS Les résultats de l'étude Tennaxia* sur l'évolution des pratiques de reporting RSE et des rapports extra-financiers fournissent un éclairage sur la façon dont les entreprises appréhendent en 2018 leur responsabilité sociale et sociétale. Ainsi, 80 % d’entre elles publient leurs objectifs en matière de RSE, contre seulement 62 % en 2017. Elles sont presque 7 sur 10 à souhaiter contribuer aux objectifs de développement durable définis par l'ONU (contre 6 sur 10 l’an dernier), en particulier en matière de lutte contre les changements climatiques, de consommation et production responsables et de travail décent. L'étude révèle également que 65 % des sociétés interrogées réalisent une analyse de matérialité, dont 83 % sont ensuite présentées en Comité de direction. Toutefois, les résultats sont loin d'être satisfaisants en termes de risques : 64 % des entreprises estiment que leur analyse de matérialité ne prend pas suffisamment en compte les risques extra-financiers. Si 55 % des entreprises ont établi une cartographie des risques RSE, seulement 42 % ont fait le lien entre leur cartographie des risques et leur analyse de matérialité. Enfin, 64 % des entreprises ont répondu aux sollicitations d'agences de notation extra-financières, mais près de 7 sur 10 estiment que la tâche est de plus en plus chronophage et moins d’une sur deux seulement jugent satisfaisante l'allocation de moyens en interne pour répondre à ces demandes. * Etude réalisée en ligne du 19 avril au 15 juin 2018 auprès de 74 entreprises cotées et non cotées, issues de 12 secteurs d'activité. « Les risques liés à la RSE ne sont pas nouveaux. Ce qui change, ce sont les attentes des parties prenantes, de plus en plus fortes, que ce soit du côté des citoyens, des clients comme des autorités » Stéphanie Canino, Eramet. « Les grandes entreprises n’ont pas attendu les réglementations pour prendre des engagements envers la société et leurs stakeholders (clients, partenaires, investisseurs…) » Xavier Guizot, Carrefour. 22 ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°18 I AUTOMNE 2018

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