ATOUTRISK N°15 HD

PORTRAIT 3 QUESTIONS À Laurence Daumas , Credit Manager Le groupe commercialise des produits dans plus de 130 pays, dont des pays considérés comme à risques. Comment arbitrez-vous en cas de difficultés de paiement ? Nous avons une dimension éthique extrê- mement présente qui fait que le risque financier est un risque parmi d’autres pour nous. Nous ne prenons donc pas la décision d’arrêter un marché pour des problématiques de paiement quand la santé des patients est en jeu et que le risque réputationnel pour le groupe est jugé fort. En pleine crise grecque, nous avons par exemple continué de livrer sonmarché malgré les difficultés de paiement. Quand le risque financier atteint un million d’euros, la décision finale relève de la Direction générale et des comités de direction. La décision sur la Grèce a ainsi été prise par la Direction générale, après qu’un processus d’escalade ait été défini en fonction de seuils de risques. Les principales difficultés que nous avons sont les risques pays (accès au financement, problèmes de trésorerie et devises) et les ratings pays. Nous avons mis en place des procédures pour les ratings des distri- buteurs, notamment dans le cadre de la cartographie, pour effectuer des due diligences financières. Nous ne nous engageons pas avec des distributeurs qui ne respectent pas un certain niveau d’indicateurs. Nous prenons parfois en charge le risque financier et les financements à la fois pour des questions d’éthique mais aussi pour ne pas être « blacklisté » par les autorités ; le risque export doit être appréhendé avec une vision long terme. Qu’attendez-vous de votre Risk Manager ? Qu’il m’aide à structurer et formaliser les démarches que l’on peut mener. Qu’il m’aide aussi à prendre du recul pour apprécier les risques, via des méthodologies comme les processus en escalade qui sont désor- mais bien structurés dans le groupe. Qu’il nous apporte également des partages d’expériences et cette ouverture d’esprit indispensable pour avoir une vision multidimensionnelle dans l’appréciation des risques pour ne pas rester « focusé » sur son propre métier. Un risque finan- cier dans le domaine de l’oncologie, par exemple, ne sera pas apprécié de la même manière qu’un risque financier dans le domaine de la dermo-cosmétique car les produits ne sont pas de première nécessité. La Direction des risques et assurances intervient sur les réunions d’arbitrage et d’instance dans toutes nos réunions afin d’appuyer des sujets très critiques pour les branches comme, par exemple, la mise en place de l’extension de la police Assurance-Crédit en Russie ou la négociation avec l’assureur sur des pays sensibles comme l’Arabie Saoudite. Grâce au CMR et à la cartographie qui nous ont permis de clairement identifier les missions et rôles de chacun, nous sommes parvenus à créer des synergies. En un temps record, nous avons mené un projet de « due diligence compliance » avec le Directeur de l’éthique et de la compliance sur tout le fichier clients et avons mené des appels d’offres pour externaliser nos due diligences. Qu’attendez-vous des banques et de votre assureur crédit ? Que les banques nous accompagnent sur le long terme sans nous « lâcher » sur des pays dits sensibles en plein milieu d’opérations, comme c’est le cas sur l’Iran. De même avec notre assureur-crédit, la Cie Euler Hermes, nous souhaitons un accompagnement même dans des pays qui traversent des crises. C’est ce qui est le plus mal vécu pour nous. Pascal_Tardieu_62 Pascal_Tardieu_65 d’experts métier. Ils passent au crible les risques en s’appuyant notamment sur ArengiBox © , le SIGR développé par Arengi. La première cartographie des risques voit le jour en 2014 ; le groupe en est aujourd’hui à sa quatrième itération. 44 risques sont identifiés, évalués et priorisés et 24 plans d’ac- tions sont engagés et suivis. Pour faire vivre cette cartographie de manière pérenne, Pascal Tardieu est parvenu à impliquer les sept membres du CoDir désor- mais pleinement associés à l’évaluation des risques. La DRA intervient ainsi deux fois par an devant le CoDir. DIFFUSER ET DÉVELOPPER LA CULTURE DU RISQUE EN INTERNE La démarche ERM est encore jeune chez Pierre Fabre et s’est construite à partir d’une classique approche « top-down». « Nous devons désormais renforcer la robustesse de notre dispo- sitif en l’enrichissant avec des approches en mode bottom-up », explique Pascal Tardieu. Sa direction s’attèle ainsi à créer ou développer des cartogra- phies de risques opérationnels au sein des filiales implantées dans une cinquantaine de pays avec le recours à des solutions plus légères à déployer (cartographies « clé en main») mais également avec des cartographies ciblées sur des risques spéci- fiques, à l’instar des risques de corruption, conformément à loi Sapin2 ou encore des cartographies ciblées sur des grands projets stratégiques comme celui de la sérialisation des médi- caments. Ce dispositif de marquage et de traçabilité deviendra obligatoire dans l’Union Européenne à partir de février 2019. Sur Sapin2, DRA est le support de la Direction de l’Éthique et de la Conformité, pilote de ce chantier. Pour que la gestion des risques soit pleinement intégrée dans tous les chantiers stratégiques, le Risk Manager s’appuie sur le nouveau dispositif de contrôle interne « qui permettra de mesurer l’efficience des dispositifs de maîtrise de risques que nous mettons en œuvre dans le cadre de nos plans d’actions », ajoute t-il. Enfin, et afin que la culture du risque se diffuse au sein du groupe, la DRA organise un séminaire une fois par an destiné à fédérer les 35 coordinateurs de risques du CMR. « C’est avant tout un lieu et un temps de partage d’expériences, où les coordinateurs de risques viennent présenter leurs plans d’actions, avec les succès et difficultés rencontrés ». L’ERM est en marche !  «Actuellement, les risques liés à la supply chain, à la conformité (Sapin 2, RGPD) et à la Cyber sécurité occupent une place impor­ tante dans l’univers de nos risques.» ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°15 I HIVER 2017/2018 9

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