ATOUTRISK N°15 HD

DOSSIER CAPTIVES : LES DÉFIS DE LA MATURITÉ régulateurs d’en dessiner les contours, sur la base des justifications apportées par les actuaires dans leurs calculs » rappelle Fabien Graeff, Responsable financement des risques et solutions captives de Marsh, rejoint par Laurent Nihoul, Directeur Assurances et Risk Corporate d’Arcelor Mittal : « Définir un niveau précis de proportionnalité n’est pas souhaitable. Tout en restant conforme à la réglementation et à l’ensemble de ses impé- ratifs, il faut laisser à chaque régulateur la latitude d’adapter son niveau d’exigence, en termes de niveau de détails et de matérialité, à la réalité et au profil des entreprises régu- lées ». Plus catégorique, Jean-Philippe Pages, Directeur Industrie et Services de Bessé estime que «  l’ACPR pourrait décider d’étudier un cadre qui définisse et orga- nise en France le principe de proportion- nalité applicable aux captives, défendu par beaucoup ». Et Philippe Vienot de rajouter une 3 e avancée qui serait bienvenue : raccourcir les délais de réponse légaux aux questions et aux demandes de licences, qui est actuellement de 6 mois en France et de 60 jours au Luxembourg, où l’absence de réponse vaut accord, contrairement à la France. « Un grand groupe a besoin de réactivité et de souplesse pour que ses programmes d’assurances collent à ses besoins et aux réalités des marchés, en constante évolu- tion. Il peut difficilement se permettre d’attendre 6 mois la réponse à des simples questions de faisabilité ou de modifi- cations d’agréments ». UNE QUESTION QUI RESTE ÉMINEMMENT POLITIQUE Bien que certains s’en défendent à demi-mots, le débat repose avant tout sur une question de volonté politique. « Les groupes français sont demandeurs d’une place de Paris attractive. Cela simplifierait la logis- tique, l’organisation de la gouvernance locale et la gestion opérationnelle des captives. Ils y gagneraient en fluidité et en efficacité » confie Fabien Graeff. « Les captives sont un outil de compétitivité pour les groupes indus- triels français. Les accueillir en France rapatrierait des emplois, des actifs TEMOIGNAGE D’OLIVER WILD, INSURANCE AND COMPLIANCE OFFICER DU GROUPE VEOLIA «Nous sommes satisfaits d’avoir implanté notre captive en France» Notre captive de réassurance existe depuis 2001 et couvre les programmes Dommages et RC du groupe. Dès le début, le choix d’implanter le siège social à Paris s’est imposé comme une évidence, compte tenu de notre activité historique auprès des collectivités publiques (même si notre portefeuille est aujourd’hui plus international). Nous sommes un des rares groupes français à avoir fait ce choix. Les membres du Conseil d’administration de la captive étant également membres du Comité Exécutif, le principal avantage de ce siège parisien est de pouvoir organiser facilement des réunions et de s’assurer de la participation et de l’implication des personnes clés au pilotage de la captive, tant sur le plan de l’allocation des risques que sur la prévention. Pour nous, ce bénéfice est supérieur aux désavantages d’une réglementation devenue plus contraignante, pour tous de la même façon d’ailleurs. Auprès de l’ACPR, nous bénéficions d’un interlocuteur dédié qui s’occupe de notre porte- feuille global et avec qui nous entretenons un dialogue constructif. Nous effectuons avec le régulateur des revues régulières du montant de nos capitaux et de nos provisions, afin que notre captive soit toujours équilibrée. À mon sens, le lieu d’implantation d’une captive n’influe pas sur le montant de ses réserves, qui doivent toujours être ajustées en fonction d’une analyse actua- rielle poussée. L’hygiène de gestion est la même pour tous sous Solvabilité 2, afin d’absorber les chocs dans le temps et de lisser les impacts qui pour- raient être significatifs. à gérer et de l’assiette fiscale » ajoute Etienne de Varax, qui estime que le Trésor comprend cet argument axé sur la compétitivité, alors que la Direction générale des impôts semble rester crispée sur l’image d’évasion fiscale qui colle aux captives. Et Etienne Charpentier de conclure, optimiste : « Bercy est favorable à l’implantation de captives en France, mais cette volonté de les attirer sur le territoire ne se traduit pas encore dans les faits ».   ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°15 I HIVER 2017/2018 36 «VERS UNE SOLUTION FULL-COMPLIANCE EN FRANCE ?» L’avis de Marine Charbonnier, Directeur Alternative Risk Transfer d’Axa Corporate Solutions  Les captives en France sont soumises aux mêmes réglementations prudentielles, comptables et fiscales que les com- pagnies d’assurance et réassureurs commerciaux. Aujourd’hui elles peuvent effectuer des « provisions d’égalisa- tion» pour les risques dus à « des éléments naturels, le risque atomique, les risques de responsabilité civile dus à la pollution, les risques spatiaux », ainsi que, à partir de 2001, pour « ceux liés aux attentats, au terrorisme et au transport aérien ». Une provision d’équilibrage est également possible pour les « opérations d’assurance-crédit ». De même une « provision d’égalisation» est afférente aux « risques décès, incapacité et invalidité* ». Ces provisions sont très encadrées, limitées en montant, dans le temps et surtout en territorialité celle-ci étant limitée à la France. Or, les captives souscrivent le plus souvent des premières lignes de programmes internationaux Dommage, RC, Transport… pour lesquels la France ne représente qu’une part. De plus, il leur est logiquement difficile de différencier primes et résultats techniques de chacun des risques éligibles en France aux provisions d’égalisation. Ainsi, sur les cinq captives françaises, historiques, deux inscrivent à leur bilan une provision d’égalisation… sur des risques très spécifiquement concernés à savoir spatiaux et nucléaires. * Sources : ACPR, SOCIETE.COM, BOFIP

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