ATOUTRISK N°15 HD
DOSSIER CAPTIVES : LES DÉFIS DE LA MATURITÉ ZOOM SUR LA PLACE DE PARIS L’ATTRACTIVITÉ DE PARIS, UN CHANTIER OUVERT ? Augmenter l’attractivité de la place de Paris fait l’objet d’un lobbying actif de la part de nombreux acteurs du marché. Élargir la provision pour égalisation et appliquer le principe de proportionnalité font partie des propositions avancées. L es captives installées en France se comptent sur les doigts d’une main. Veolia, Areva et Dassault en font partie. Pourquoi sont-elles si peu nombreuses ? « Dans le cadre de l’UE, et au-delà, il y a une concurrence rude entre les pays pour attirer les captives. Si la France veut faire partie du jeu, elle doit instaurer un avantage compétitif qui la distinguera » avance Etienne Charpentier, Directeur Risk Finance d’Aon. « La place de Paris dispose a priori de conditions favorables au développement des captives, à condition que la réglementation en vigueur évolue pour lui permettre de rivaliser avec les autres places » estime pour sa part James Donald, responsable du département «Captive Solutions» au sein de SCOR Alternative Solutions. « On constate une certaine méconnaissance de la part des instances de régulation fran- çaises de certains risques d’entreprise assu- rables et de ce qu'apportent les captives à leur traitement » ose même Philippe Vienot, Risk Manager du groupe BNP Paribas, avant d’ajouter : « c'est tout un écosystème qu'il conviendrait de créer, comparable à celui que l'on retrouve à Luxembourg et Dublin : un interlocuteur dédié, une législation adaptée, des experts comptables, des commissaires aux comptes, des actuaires, des gestionnaires d’actifs et des experts sinistres spécialisés… ». Même son de cloche pour Laurent Bonnet, Directeur du pôle Financements alternatifs de Gras Savoye Willis Towers Watson, qui recon- naît poliment que « les autorités de contrôle sont très professionnelles mais ne maîtrisent pas toujours le sujet des captives et la néces- sité de créer un dialogue avec l’ensemble des parties prenantes ». ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°15 I HIVER 2017/2018 34 INTERVIEW DE BERNARD DELAS, VICE-PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION (ACPR) ©ACPR–ValérieCornet Comment voyez-vous le rôle des captives aujourd’hui ? Les captives d’assurance ou de réassurance - il y en a près de 6000 dans lemonde - ont tout à fait leur place, dans les grands groupes industriels ou commerciaux, comme ou- tils de gestion de leurs risques. Elles leur donnent un ac- cès direct au marché de la réassurance et les placent dans une position privilégiée pour négocier et optimiser leur programme international de couverture de l’ensemble des risques du groupe. Elles sont aussi utilisées pour mettre en place desmécanismes de gestion interne des franchises en adaptant leur niveau à la taille ou à la nature des activités des différentes filiales. Pour un groupe, le recours à une captive est ainsi l’instrument qui permet le mieux de dé- finir et d’objectiver la ligne de partage, qui peut d’ailleurs être évolutive, entre ce qui relève de l’auto-assurance et ce qui doit être transféré au marché. Pourquoi la place de Paris attire-t-elle si peude captives ? Il est vrai que la plupart des captives en Europe sont si- tuées au Luxembourg, en Irlande ou à Malte. Cela tient à plusieurs raisons. Les différences de fiscalité entre les États membres tout d’abord. Ces différences, qui sont parfois significatives, concernent toutes les sociétés et non pas seulement les captives d’assurance ou de réassu- rance. Elles se réduiront sans doute avec le temps mais, pour le moment, en Europe il n’y a pas d’harmonisation de la fiscalité des sociétés. Ensuite, et au-delà des as- pects fiscaux, certains États membres ont fait de l’ac- cueil des captives une spécialité. Ils ont constitué un vé- ritable écosystème qui a acquis progressivement un très bon niveau d’expertise et de professionnalisme. Pour les groupes industriels ou commerciaux, la présence de so- ciétés de service spécialisées dans la gestion des captives est un élément déterminant dans leur choix d’implanta- tion. Ces sociétés de service connaissent parfaitement ce marché très particulier ainsi que les démarches à ef- fectuer. C’est très sécurisant pour les décideurs et cela contribue fortement à la concentration des captives dans les quelques places européennes qui ont développé un savoir-faire reconnu dans cette activité de niche. «Une captive créée par un industriel pour gérer ses risques a tout à fait sa justi- fication»
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