ATOUT RISK MANAGER N°32

ATOUT RISK MANAGER N°32 I PRINTEMPS 2022 71 Veille et position - Conflit Russie-Ukraine à peu près un point de croissance de moins », a ajouté le représentant d’Allianz Trade. Mais selon un autre scénario catastrophe, baptisé « black-out », la crise coûterait plutôt trois points d’inflation et deux points de croissance, ce qui aboutirait à une récession. Ce scénario de « black-out » aurait une probabilité de 35 %. Dans le pire des scénarios, l’inflation pourrait monter en Europe au-dessus de 7%. « Mais nous n’en sommes pas là », a voulu rassurer Ludovic Subran. Le gaz continue de couler, de la Russie vers l’Europe, et même à hauteur de 30 % de plus qu’avant le conflit. « Il n’y a pas de risque de coupure totale d’ici l’hiver prochain », a-t-il précisé. Mais les risques de nationalisation dans notre partie du monde existent (?). C’est déjà le cas en Russie. «Les conséquences des ces risques politiques devraient se faire ressentir en France également» par exemple : pour les ménages, la facture énergétique se monte déjà à 600 euros par ménage en France. En 2017-2018, l'augmentation de 10 centimes des prix à la pompe avait contribué à lancer le mouvement des gilets jaunes. Aujourd’hui, les prix des carburants ont presque doublé. Après l’élection présidentielle d’avril en France, existent vrais risques de d’émeutes. L’épargne accumulée par les 25% lesmoins riches dupays a été « mangée » par la crise énergétique. Mais il reste des marges de manœuvre. Selon l’économiste, il est possible d’absorber le coût de la crise. Avec toutefois, plus de risques d’impayés pour les acteurs privés. Pour le chef économiste d’Allianz Trade, il y a « des secteurs plus risqués » où des dérapages sont à craindre : l’énergie, le commerce et la finance. Outre les risques financiers, la survenance des risques politiques en Europe, avec de possibles nationalisations temporaires est réelle. « Cela peut changer un peu les règles du jeu des affaires », a prévenu Ludovic Subran. La crise menace également certains pays touristiques, comme l’Égypte, sur lesquels pèse « une accumulat ion de risques ». Pour lui, il n’y a « pas de très forte probabilité d’une crise financière ». Il faut néanmoins « être prudent sur les investissements financiers ». Justement, JeanBaptiste Ory a mis en garde contre les risques d’expropriation « de fait enUkraineouenRussie ». Ainsi, compte-t-on déjà pour « quinze milliards d’euros d’avions de ligne ou de jets privés qui sont bloqués en Russie, en réalité saisis » par les autorités. «Grand cyber bazar» Aon prévoit sur ce sujet de «gros sinistres à venir». Des grands projets vont être remis en cause, ce qui « va impacter les assureurs », insiste Jean-Baptiste Ory, Head of Political Risks, Il ajoute que le conflit en Ukraine a fait naître « une concentration de toutes les familles de risques dans un seul pays », la Russie. Lui aussi redoute de « vraies alertes sur le climat social ». Il recommande aux Risk Managers de prendre leurs précautions sur l’exposition de leurs entreprises, en Afrique de l’Ouest notamment. Quant à Benoît Grunemwald, expert en cyber sécurité chez ESET, il a alerté sur le « grand cyber bazar » né avec le conflit en Ukraine. Il résulte « d'actions menées par des groupes liés à des États mais aussi par des activistes du type Anonymous ». Des activités qui « sèment le trouble » et provoquent de la « désinformation ». Selon lui, le conflit est entré dans une « zone grise ». Parmi les risques encourus, la possibilité d’une rupture d’Internet à cause de « câbles sous-marinsqui pourraient êtrecoupés, sabotés », mais aussi la crainte de potentiels sabotages, de coupures d’électricité via des attaques cyber, comme il y en a déjà eu en Ukraine. Cinq ans pour rebrancher la Russie au système financier La recrudescence et la persistance de ces cyber attaques invite l’expert de chez ESET à délivrer son premier conseil aux entreprises : surveiller ses actifs, vérifier qu’il n’a pas de comportements suspects. Les questions ont bien sûr porté sur l’évolution du conflit et ses conséquences pour les entreprises qui ont des activités en Ukraine et enRussie. Pour Ludovic Subran, les entreprises qui choisissent de « faire le dos rond » doivent s’attendre à ce que le « rebranchement » de la Russie au système financier mondial, si demain il y avait un cessez-le-feu, prendra « une demidécennie ». Et concernant les entreprises qui choisiront de rester en Russie «dans quel état vont-elles retrouver leurs actifs?» s’est interrogé le chef économiste. Toutefois, ce dernier n’est pas loin de leur donner raison car à court ou moyen terme, le conflit devrait s’achever avec « une neutralité de l’Ukraine », sur le modèle de la Finlande. n

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