ATOUT RISK MANAGER N°32

ATOUT RISK MANAGER N°32 I PRINTEMPS 2022 33 Dossier - Prenons les risques d’un nouvel élan Le choc de la crise sanitaire a déstabilisé en profondeur l’humanité, accéléré le changement de nos sociétés et de nos économies, elles-mêmes en proie à plusieurs ruptures. Pour analyser, commenter, comprendre l’état dumonde, plusieurs personnalités sont venues exposer leur vision aux 29e Rencontres du RiskManagement. À l’échelle de la planète, les ruptures, les mutations et les défis liés à la crise sanitaire, au dérèglement climatique, aux tensions géopolitiques, au terrorisme, aux menaces cyber, aux pénuries d’approvisionnement, donnent le tournis. Le photographe de la planète, Yann Arthus-Bertrand, le général François Lecointre, ancien chef d’État-major des Armées, l’économiste libéral, Nicolas Bouzou, la philosophe, Monique Canto-Sperber, spécialiste de la pensée morale et politique sont venus donner leurs clés de compréhension de ce monde étonnant. Des ruptures multiples Rupture sanitaire d’abord : le coronavirus et ses variants résistent et le retour à la vie normale pour les citoyens et les entreprises n’est pas acté. « La crise sanitaire a totalement modifié notre vision des risques » a posé Nicolas Bouzou, auteur d’« Homo sanitas », qui défend l’idée que l’homme prend soin de lui, des autres et œuvre ainsi à la marche du monde. Rupture géopolitique ensuite : le retrait des États-Unis d’Afghanistan en 2021 a marqué la fin du bouclier américain et le basculement vers un nouvel ordre mondial. À l’Est, Xi Jinping a identifié dans les Jeux olympiques de Pékin un tremplin pour donner à l’Empire du milieu une dimension sportive mondiale. « Jamais le monde n’a connu une Chine aussi puissante et elle s’appuie aussi sur la diplomatie des stades » a décrit l’enseignant chercheur Emmanuel Véron, docteur en géographie, spécialiste de la Chine contemporaine et des relations internationales à l’École navale, lors de l’atelier consacré aux enjeux et aux risques chinois. Ruptures politiques et sociales également : l’abstention record aux scrutins électoraux en France creuse le déficit de confiance entre gouvernants et gouvernés et pourrait s’aggraver si l’offre politique est insuffisante, laissant la place aux extrémismes. « Les risques que nous affrontons sont tels (épidémie, climat, crise sociale, tensions internationales, terrorisme), que le temps est venu du despotisme avec un objectif d’efficacité plutôt que le maintien de la liberté d’expression : c’est la tentationde ladémocrature » alerte la philosophe Monique Canto-Sperber (lire son interview page 36). «Do look up ! » Rupture écologique enfin : l’année 2021 a battu des records de chaleur, avec des feux géants en Amérique et en Europe du Nord, les catastrophes naturelles dues au réchauffement climatique ont marqué l’actualité, tempêtes et inondations s’affichent sur les écrans à longueur de journaux télévisés. Et l’année 2022 a démarré avec les mêmes désordres météorologiques, loin de l’objectif de réchauffement limité à 1,5 degré, assorti d’une neutralité carbone en 2050 comme le dictent les « Accords de Paris ». Le déni climatique est dénoncé par les scientifiques du Giec, par Jean-Marc Jancovici, Président de The Shift Project et fondateur du cabinet Carbone 4, pour qui « il n’y a pas d’échappatoire au problème climatique ». La catastrophe annoncée est à portée d’objectif, comme l’a montré Yann Arthus-Bertrand en ouverture des Rencontres pour alerter sur les risques de la Terre et « le déni de la sixième extinction ». La preuve par l’image. Des images presque trop esthétisantes par rapport à la gravité du propos. Dans sa longue présentation, le photographe repenti des déplacements carbonés (il a parcouru la planète en avion et en hélicoptère pour saisir le chaos environnemental à travers son objectif et poursuit désormais son travail avec un drone) a fait mouche. Le président de la Fondation GoodPlanet a attisé l’éco-anxiété et réveillé les esprits. Le message était clair : « Do look up! », en référence au film produit par Netflix avec une Meryl Streep en présidente de la première puissance du monde qui refuse de voir la catastrophe climatique arriver. «Aucune entreprise de Tech n’est européenne, la France compte des licornes dans le secteur des loisirs, des paris sportifs, de la culture, mais si c’était dans l’informatique quantique, ce serait mieux ! » Nicolas Bouzou, économiste

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