ATOUT RISK MANAGER N°29

ATOUT RISK MANAGER N°29 I ÉTÉ 2021 31 Dossier - L’audit et l’expertise avant sinistres : nouvelles règles pour nouveaux enjeux E n réduisant drastiquement les déplacements, la crise sanitaire a logiquement ralenti la gestion des dossiers sinistres. Pour ne pas (trop) impacter les délais de traitement et donc de règlements, les assureurs ont adopté plusieurs stratégies. Pour les sinistres déclarés avant le confinement de mars 2020, et qui avaient déjà fait l’objet d’unepremière visite sur site, la transmission de documents ou de photos complémentaires a pupermettredefaireavancerledossieretd’aboutir, pour les sinistres à faible enjeu, à un règlement et à la clôture du dossier. Pour les sinistres survenus après mars 2020, le recours aux drones et aux images satellites (comparaison avant/après), déjà assez développé sur le marché, a été accentué. « Cela apermis dedresser unpremier état des lieux et de prouver de façon tangible la matérialité du dommage (inondation, incendie, toiture arrachée…), avant que les premières mesures de sauvegarde ou de déblaiement ne commencent. Ces échanges à distance étaient également importants en termes de conseils sur la reprise d’activité. Toutefois, sur des sinistres à gros enjeux comme cela est survenu en Italie en plein confinement, nous nous sommes néanmoins rendus sur place en obtenant des autorisations de déplacement exceptionnelles » relate Sophie Gravereaux, Responsable «département sinistres» de FM Global pour les Opérations de Paris. « Dès le début de la crise sanitaire, nous avons proposé aux compagnies d’organiser des expertises dites «force majeure », à distance, menées par des experts de terrain spécialisés. Cette alternative a bien fonctionné car elle apporte flexibilité et réactivité dans les délais d’intervention. Néanmoins, il faut reconnaître que l’expertise n’est pas aussi complète que dans une expertise terrain, notamment car il est difficile de réaliser la visite de risque. En outre, nos études montrent que 30 % des clients ayant eu une expertise visio auraient préféré une expertise sur site» dévoile Olivier Willems, Directeur général délégué de Stelliant. Accepter de travailler différemment Pour Emmanuel Geli, Directeur général de Polyexpert, « la visio-expertise a permis de vérifier la conformité du risque par rapport au contrat (moyens de protection incendie, alarmes…) et d’évaluer le niveau de destruction et l’ampleur du sinistre. L’acceptabilité est plutôt bonne, il y a majoritairement un effet «waouh » qui plaît beaucoup, même si parfois, elle peut être considérée comme un service «low-cost», avec un degré d’attention moindre» . Pour autant, la visio-expertise se suffit rarement à elle-même pour les risques industriels. « Quand les sinistres sont complexes, les drones et le recours aux photos/vidéos sur smartphone ne suffisent pas. Nous avons donc attendu de pouvoir retourner sur sitepour statuer, cequi a bloqué l’avancement des dossiers sur plusieurs mois. Nous avons de plus tenu compte du contexte de prudence sanitaire vis-à-vis des collaborateurs » explique Thierry Madic, Président d’UPEMEIC. Pour les sinistres simples, la Fédération des Sociétés Expertises a signé un accord avec les assureurs pour que les conditions d’expertises soient différentes du cadre habituel et puissent se faire à distance. Une «souplesse» de circonstance qui a impacté la maîtrise de la charge technique, comme l’expliqueEmmanuel Geli : « Les assureurs ont accepté de régler les sinistres en mode dégradé, avec moins d’éléments d’analyse que d’habitude. Clairement, cela a joué en faveur des assurés car on pouvait moins détecter la fraude à l’assuranceou vérifier la conformitédu risque avec autant d’acuité que d’habitude. À distance, nos interlocuteurs ne nous montrent que ce qu’ils veulent nous montrer ». n L’expertise après sinistres en mode dégradé L’AVIS DE L’AMRAE Le fonctionnement optimum des polices d’assurance Dommages n é c e s s i t e d e s é c h a n g e s d’information massifs de l’assuré vers l’assureur (actualisation des listes de sites, valeurs assurées, descriptifs des activités et des risques, interdépendances, suivi des recommandations, informations sur les projets, déclarations de sinistres…) et en retour des assureurs vers l’assuré (polices, rapports de visite, recommandations, exposition aux risques naturels, revues de projets, gestion des sinistres…). L’industrie de l’assurance longtemps t r è s t r ad i t i onne l l e dan s s e s approches privilégiant les échanges par mail (au mieux la mise à disposition d’extranets), et les visites physiques, évolue… L’innovation technologique permet aujourd’hui les audits à distance et les échanges automatiques d’information entre systèmes,… a l o r s même que l e s a s s u ré s s’équipent de plus en plus en SIGR (Systèmes d’Information de Gestion des Risques) de plus en plus complets et sophistiqués. La Covid-19, en ralentissant les audits physiques, provoque une accélération bénéfique de la digitalisation et amène les différents a c t eu r s ( a s s u r é s , a s s u r eu r s , courtiers, experts) à repenser leurs interactions. Tous les acteurs sont cependant d’accord pour observer que la nécessaire digitalisation ne devra pas annuler les visites physiques et les réunions entre individus qui sont le sel de nos métiers et le ciment des relations de confiance durables nécessaires à cette industrie. Comme dans tous les domaines, la crise a donc en la matière révélé des opportunités. Et comme dans tous les domaines, il s’agit aussi de conjuguer l’innovation et les bienfaits de pratiques classiques éprouvées. L’AMRAE se réjouit de cet équilibre au service d’une gestion des risques toujours plus efficace. « Sur des sinistres à gros enjeux comme cela est survenu en Italie en plein confinement, nous nous sommes rendus sur place en obtenant des autorisations de déplacement exceptionnelles» Sophie Gravereaux, Responsable «département sinistres» de FM Global pour les Opérations de Paris

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