ATOUT RISK MANAGER N°21

ATOUT RISK MANAGER N°21 I ÉTÉ 2019 6 PORTRAIT Par Nathalie Arensonas PHILIPE COTELLE, RISK MANAGER D’AIRBUS DEFENCE AND SPACE CYBER ACTIF 30 janvier 2019, les boîtes mails des journalistes s’affolent : un communiqué de presse d’Airbus annonce avoir détecté un « incident de cyber sécurité» dans les systèmes informatiques de sa division aviation civile. Précisant qu’il n’avait « aucun impact » sur ses opérations. C’est la première fois qu’un grand groupe industriel international de cette importance et dimension officialise une cyber intrusion. Le sujet est tabou, la menace réelle. Les hackersont (sur)volédesdonnéespersonnelles d’employés d’Airbus. Si le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) oblige à notifier la CNIL, l’avionneur a également fait le choix d’une large communication publique. PARLERAUXASSUREURS Une fois le premier «urgent» de l’AFP tombé dans les rédactions, Philippe Cotelle prend le relais auprès des assureurs : «J’ai convaincu en interne qu’il fallait communiquer auprès de cemarché, j’ai organisé le jour même un call, animé par le directeur de la sécurité informatique et moi- même» , explique-t-il. Passé par la division satellites de Matra et l’assurance des risques spatiaux chez Scor (quatrième réassureur mondial), ce diplômé de Sup Aéro dirige depuis sept ans les risques et les assurances de l’activité Espace, Défense et aviationmilitaire d’Airbus, l’une des deux divisions du groupe aéronautique, spécialisée dans les avions militaires, les drones, les missiles, les lanceurs spatiaux et les satellites. Il est également le coordinateur et le référent cyber (risques et assurances) pour les deux autres activités d’Airbus : avions commerciaux et hélicoptères. «Le risque cyber n’est pas spécifique àma branche. La couverture d’assurance du risque est donc mutualisée au niveau du groupe pour l’ensemble des activités d’Airbus » , décrypte Philippe Cotelle. Pourquoi donc « affoler » les assureurs au lendemain de la cyber attaque de janvier, l’une des innombrables que subit Airbus, comme en subissent d’autres entreprises, quelle que soit leur taille ? « C’était pour moi une opportunité unique de lever les tabous et briser le mur du silence», explique-t-il. «Notre partenariat repose sur la transparence.» BIO EXPRESS Quatre enfants, diplômé de l’École nationale supérieure de l’aéronautique et de l’espace (Sup Aéro) et d’un MBA de l’Essec & Mannheim, Philippe Cotelle, 49 ans, a démarré sa carrière en 1995 chez Matra Marconi Space dans la conception de satellites. Scor le recrute en 2000 comme souscripteur pour sa division risques spatiaux. Il assure les satellites et les fusées. En 2001, six satellites parmi les plus chers mondiaux sont déclarés en perte totale. Un ticket à 1,8 milliard de dollars ! De retour dans l’industrie en 2004 comme Risk Manager d’Astrium Services à Paris, il dirige ensuite le département Risk Management et Assurances de toute l’activité spatiale Astrium (de 2006 à 2012), à Munich. Depuis, Philippe Cotelle est directeur Risques et assurances d’Airbus Defence and Space qui regroupe les activités spatiales, défense et aviation militaire. Administrateur de l’AMRAE et de FERMA, l’association européenne des associations de Risk Managers, il est également membre du groupe d’experts internationaux de l’OCDE, sur le programme «Improving the measurement of digital security incidents and risk management» [améliorer la mesure des incidents de cyber sécurité et du risk management]. Il coordonne par ailleurs un programme de recherche sur la gestion du risque cyber à l’Institut de recherche technologique System X (Paris Saclay). À 49 ans, le directeur des risques des activités Espace, Défense et Aviation militaire du groupe Airbus a une deuxième vie : évangélisateur. Il a compris très tôt les enjeux financiers du risque cyber et n’a de cesse de prêcher la cause auprès de ses dirigeants et de la communauté du risque. Il est pour l’AMRAE la cheville ouvrière d’un guide que cosigneront dans quelques mois Guillaume Poupard, patron de l’ANSSI*, le gendarme de la cyber sécurité et la présidente de l’association, Brigitte Bouquot

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