ATOUT RISK MANAGER N°18

VEILLE ET POSITION L es biens de consommation composent une activité hors normes, faisant aujourd’hui et en particulier l’immense fortune des géants du e-commerce (la capitalisation boursière de la société Amazon vient de dépasser les 1000 milliards de dollars). En Europe, le marché des biens représente 25 % du PIB et plus de 3 000 milliards d’euros**. Ces produits, toujours plus nombreux et complexes, répondent à nos besoins fondamentaux ou superflus, les précédant même par des innovations technologiques attractives. Pour autant, la révolution digitale, la mondialisation, les moyens déployés pour produire ou commercialiser, fragilisent aussi cette réalité économique qui repose sur un univers de risques explosifs pour le consommateur, l’environnement et finalement les entreprises qui commercialisent les produits. ATTEINTES À LA PERSONNE, L’ENVIRONNEMENT : LES RISQUES SPÉCIFIQUES DES PRODUITS DE CONSOMMATION Les risques Produits concernent en premier lieu les atteintes à l’intégrité des personnes : des faiblesses dans la protection de leur sécurité physique (dangers mécaniques…), des vulnérabilités dans les domaines sanitaires (considérable sujet des substances préoccupantes…) ou sociaux (drame du Rana Plazza,…), ou encore des failles dans la protection des données personnelles qui suivent chacun de nous (objets connectés…). Les risques Produits sur l’environnement font aussi l’objet de dénonciations graves et répétées. Pour répondre aux attentes fortes et demeurer dans un univers concurrentiel de plus en plus aiguisé, les entreprises doivent rapidement intégrer, dès la conception, les enjeux RSE de leurs produits (contribution à la dégradation des océans par les déchets plastiques, à la disparition de ressources naturelles ou à la pollution de l’air intérieur…). Aujourd’hui, ces risques Produits sont (superficiellement) connus dans leurs contours, mais leur contenu (déterminants, causes, conséquences…) demeure très mal appréhendé par les acteurs en présence : • Les scientifiques eux-mêmes peinent à évaluer et fixer les enjeux, dans une course ingagnable avec des risques sans cesse émergents. L’état des connaissances est en perpétuelle évolution, voire turbulence et les luttes lobbyistes amplifient la confusion. • Les médias ont souvent une approche partielle, simplifiée pour n’exposer que le côté « choc », mettant en avant le danger et non le risque réel. • L’opinion publique, connectée aux réseaux sociaux, surréagit instantanément à tout post- tweet-like… censé révéler une insécurité qui mériterait parfois vérification. Ces expressions imparfaites des risques Produits aggravent les difficultés de lecture, de mesure et de gestion de ces risques, auxquelles les entreprises doivent faire face. D’autres sources de risques exposent les entreprises : l’imbroglio réglementaire difficile à démêler autant que répressif, le vaste sujet des données (de la conception du produit à son usage) qui bouleverse les concepts de responsabilités et, généralement, l’insuffisance d’expertise (technique, juridique, managériale), des opérateurs comme des autorités chargées de les surveiller. SÉCURITÉ DES PRODUITS DE CONSOMMATION : POUR UN RISK MANAGEMENT APPLIQUÉ En réaction aux dysfonctionnements dans l'affaire Lactalis, des recommandations ont été publiées cet été pour améliorer l'efficacité des procédures de retrait-rappel des produits dangereux, à l’initiative du ministère de l’économie*. Ces propositions vont dans le bon sens mais les fortes vulnérabilités attachées aux risques des produits de consommation ne sont toujours pas abordées à la mesure des enjeux actuels. Sylvie Pugnet, Avocat Droit & Risques Produits 46 ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°18 I AUTOMNE 2018

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