ATOUT RISK MANAGER N°17

ACTUALITÉ DE L’AMRAE 53 ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°17 I ÉTÉ 2018 « Le monde restera agité » Invité à s’exprimer devant les adhérents de l’AMRAE pour clôturer la Journée des Commissions 2018, l’ancien ministre des Affaires étrangères et désormais consultant, Hubert Védrine, a dressé un tour d’horizon des risques géopolitiques qui pèsent aujourd’hui sur le monde. L’Europe face à ses contradictions Pour Hubert Védrine, le principal défi à relever pour l’Europe ne vient pas de l’extérieur, mais du décrochage des classes populaires et moyennes du projet européen. « Si on avait écouté les signaux, il n’y aurait pas eu le Brexit, ni l’AfD en Allemagne, ni ce que l’on voit en Italie » . Désormais, plusieurs scenarios sont possibles : la dislocation totale ? « Je n’y crois pas car personne ne veut sortir de l’euro, pas même les Grecs. L’euro a un avenir solide ! » Une Europe fédérale alors ? Aucun pays n’en veut non plus, principalement pour des raisons de sécurité et de souveraineté. « Un scénario entre les deux est à construire. La vraie urgence pour les dirigeants européens est d’imposer une maîtrise des flux migratoires, pour limiter l’immigration aux réfugiés politiques, en danger dans leur pays » . Trump : ni isolationniste, ni imprévisible « L’élection de Donald Trump a été un vrai bouleversement et a provoqué un électrochoc dont nous ne sommes toujours pas remis ! Il est comme un éléphant dans un magasin de porcelaine » a estimé Hubert Védrine, tout en affirmant que ce dernier n’était pas isolationniste, commebeaucoup l’affirment. « Il est en revanche unilatéraliste, dans le sens où il ne veut pas avoir à coopérer ou à négocier avec des instances internationales comme l’ONU ou le G7. Par ses décisions, il est en train de tuer l’OMC » . Pour autant, l’ancien ministre estime que Trump n’est pas imprévisible. « Il a une idée simple : il suit son électorat de base, fatigué de la mondialisation » . Et d’ajouter : « Le risque serait que son mandat ne soit pas à une parenthèse passagère mais une tendance de fond, et qu’il soit réélu ! Car finalement, cela fait longtemps que les États-Unis ne veulent plus être les gendarmes du monde » . Il faudra donc surveiller les élections de « mid-term » avec attention… Une instabilité géopolitique globale Plusieurs autres sujets d’instabilité vont continuer à agiter la planète selon Hubert Védrine. Celui des affrontements djihadistes évidemment, qui touche aujourd’hui trois- quarts de la population mondiale, et dont l’Europe n’est qu’un champ de bataille occasionnant des dommages collatéraux. « La solution prendra du temps et ne pourra venir que de l’Islam et des musulmans eux- mêmes. Mais je suis optimiste à long terme, les islamistes ne peuvent pas gagner. » Quant à la Russie, trop longtemps traitée comme quantité négligeable, et désormais portée par le nationalisme de Poutine, elle va conserver sa capacité de nuisance, tandis que les Européens continueront leurs sanctions : « Il serait peut-être temps, pour l’Europe, de se tourner vers la Russie. C’est une mauvaise gestion du problème, pire qu’à la fin de la guerre froide. » Pour autant, Hubert Védrine estime qu’il y a peu de risques de conflits directs, même si l’alliance Israël/Arabie Saoudite face à l’Iran peut inquiéter. En Corée du Nord, le dégel est amorcé. Au Moyen-Orient, aucun des pays en jeu ne peut l’emporter complétement. « L’unique risque tangible aujourd’hui se situe en mer de Chine, contrôlée par les États-Unis mais lorgnée par la Chine. Les deux marines risquent de s’affronter dans cette région » a prévenu Hubert Védrine, avant de conclure sur un ton de météorologue : « il n’y a de mer calme en vue nulle part, mais pas de cyclone permanent non plus. La mer restera agitée. Les dirigeants doivent parvenir à mener leur barque dans ce contexte. » « Le risque serait que son mandat (Trump) ne soit pas une parenthèse passagère mais une tendance de fond, et qu’il soit réélu ! Car finalement, cela fait longtemps que les États-Unis ne veulent plus être les gendarmes du monde. » « L’unique risque tangible aujourd’hui se situe en mer de Chine, contrôlée par les États-Unis mais lorgnée par la Chine. Les deux marines risquent de s’affronter dans cette région. » ÉVÉNEMENTS

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