AMRAE - ATOUT RISK MANAGER

VEILLE ET POSITION européenne pour contraindre la France à modifier sa réglementation et obliger la FGAO à couvrir également ces assureurs. Concernant les entreprises qui ont sous- crit des assurances DO pour leur propre compte, le FGAO n’interviendra pas et les sinistres ne seront donc pas couverts (art. L 421-9 du Code des Assurances). Il leur appartiendra donc d’agir directe- ment contre les intervenants responsables et leurs assureurs RC Décennale (si ce ne sont pas les assureurs en liquidation…), sans pouvoir bénéficier d’un préfinance- ment des travaux comme cela serait le cas si l’assurance DO pouvait jouer. De la même manière, le FGAO ne couvri- ra pas non plus les professionnels ayant souscrits des assurances Responsabilité Décennale qui n’auront d’autre choix que de trouver rapidement de nouveaux assureurs, si besoin en ayant recours au Bureau Central de Tarification. PRINCIPE DE PRUDENCE RENFORCÉ POUR LES INTERMÉDIAIRES Enfin, les intermédiaires qui ont re- commandé ces assureurs à leurs clients encourent le risque de voir leur res- ponsabilité professionnelle engagée à défaut d’être en mesure de justifier la pertinence du choix de l’assureur pro- posé à leurs clients par préférence aux assureurs classiques. Comme l’a rappe- lé l‘ACPR, « chaque professionnel inter- venant dans une chaîne de distribution d’assurance a la responsabilité de la sé- lection de ses partenaires, intermédiaires ou assureurs, pour son activité auprès du public, en France ». Une intervention auprès de l’Eiopa semble nécessaire pour que le système de la LPS soit mieux encadré avec des règles appliquées par tous et un contrôle plus homogène par les régulateurs. La disparition d’assureurs n’est jamais une bonne nouvelle surtout dans un marché avec peu d’acteurs comme l’as- surance construction, et cet épisode doit rappeler aux Risk Managers l’importance de choisir des assureurs notoirement sol- vables, pérennes et professionnels, quel que soit leur pays d’origine. UN GRAND PAS POUR LA GESTION DU «CYBER-RISQUE» PAR LES ENTREPRISES L a protection numérique du citoyen occupe le devant de la scène depuis plusieurs mois avec le règlement eu- ropéen sur la protection des données, dit RGPD. Quand la numérisation est le mo- teur de la croissance économique mondiale, il faut également braquer les projecteurs sur un autre texte européen moins connu, la directive sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’information ( Network and Information Security, NIS ). Cette directive, qui organise la sécurité nu- mérique des États membres et des entreprises européennes, est en cours de transposition en France avec la désignation de près de 2 000 opérateurs de services essentiels (OSE) sous le pilotage de l’Agence nationale de la sécuri- té des systèmes d’information(ANSSI). Les entreprises de toutes tailles qui conduisent de solides politiques de gestion des risques ont compris que le risque cyber est devenu aujourd’hui un risque d’entreprise, pas simple- ment un risque technique. Ainsi, elles identifient les scénarios de surve- nance du risque, elles en modélisent l’impact économique, elles investissent pour organiser la continuité de l’activité et gérer la crise en cas d’attaque, et in fine financer certains im- pacts résiduels par l’assurance. Dans notre économie ouverte où le risque cyber ne connaît pas de frontière, le couplage entre la directive NIS et la gestion des risques per- mettra au tissu économique français d’organi- ser une indispensable résilience numérique. En Europe, la France a toujours été à la pointe pour assurer la continuité de l’État et des grandes entreprises. Dès la Constitution de 1958, l’État n’a eu de cesse de se doter d’un cadre législatif et réglementaire pour organi- ser la résilience de la nation. Avec la notion d’opérateur d’importance vi- tale (OIV) – ordonnancée en décembre 1958, modifiée en 2004–, « les entreprises sensibles Parallèlement au règlement européen sur la protection des données, une directive Sécurité des réseaux et des systèmes d’information est en voie de transposition. 0123 MERCREDI28FÉVRIER2018 idées | 7 LETTRE DE LA CITY | par éric albert Au Royaume-Uni, les ruines du paysage bancaire U nedécenniedéjà.En février 2008, lapetitebanqueNorthernRockau Royaume-Uni venait d’être natio- nalisée, Bear Stearns aux Etats- Unis allait faire faillite, et Lehman Brothers s’écroulait quelques mois plus tard. La plus grande crise financièredepuis 1929 commen- çaitsontravaildedévastation. Aujourd’hui, les ruinesde l’époquesonten- corepartout, sans compter les répercussions politiques évidentes, de Donald Trump au Brexit.Du 19 au 25 février, auRoyaume-Uni, les résultatsannuelsdesgrandesbanquesdu pays sontvenus rappelerque les grands éta- blissementsfinancierspeinentencoreàsere- mettreduchoc. Un chiffrepour résumer lemassacre: selon noscalculs,lesquatregrandesbanquesbritan- niques ont supprimé presque 300000em- ploisdepuis2008,soitplusdutiersdeleursef- fectifs. Les géants bancaires d’autrefois ne sontplusque l’ombred’eux-mêmes. Des quatre mastodontes d’antan, trois (HSBC,LloydsetBarclays)demeurentaffaiblis par les scandales, mais se sont assainis. Le quatrième,RoyalBankofScotland, resteune calamité, encorenationalisée.Disons-le clai- rement:cetétablissementn’aurait jamaisdû être sauvé en 2008; unemise en faillite or- donnéeauraitétépréférable. Labanquequi s’en sort lemieux estHSBC. Ellen’a jamais frôlé la faillite,et reste laseule duRoyaume-Uniàdemeurerungéantmon- dial.En r vanche, l’établissement a été forte- ment ébranlé par les scandales, des cartels mexicains de la drogue qui blanchissaient leurargentpar son intermédiaireauxclients quiéchappaientaux impôtspar lebiaisdesa banqueprivée suisse. L’établissement espère désormais tourner la page avec le change- mentde sesdirigeants: la semainedernière, sondirecteurgénéral,StuartGulliver,aquitté sonposte,quelquesmoisaprèssonprésident, DouglasFlint.Lesnouveauxvenus,MarkTuc- ker à laprésidence,unoutsiderquivientdu mondede l’assurance,et JohnFlint,quia fait tous lesmétiersàHSBCenpresquetrenteans, espèrentêtre lesvisagesdurenouveau. PRÊTSHASARDEUX IlyaensuiteLloydsBankingGroup.L’établis- sement avait dû être nationalisé partielle- mentparl’Etatbritanniquependantlacrise,à lasuitedeprêtshasardeuxsur lemarché im- mobilier. Côté bonne nouvelle, l’Etat ayant désormaisvendu l’intégralitédesaparticipa- tion (àperte), l’établissementestdenouveau entièrementprivé, et il réalisedesbénéfices solides.Mais côtémauvaisenouvelle, les er- rements du passé continuent à représenter un lourd boulet à traîner. En particulier, les ventes abusivesdeproduitsd’assurance sur prêts ( payment protection insurance , PPI) n’en finiss ntpasdepeser sur ses comptes. LloydsBankingGroup adéjàdû rembourser 18milliardsde livres (20,5milliardsd’euros)à ses clientsdans ce scandale.La semaineder- nière, elle a dû ajouter 1,7milliard de livres supplémentaires. Barclaysaussivoit lesnuagesde lacrisecon- tinuer à planer au-dessus de lui. Fin 2008, l’établissementavaitévitéde justesse lanatio- nalisation.Au derniermoment, desmilliar- dairesduMoyen-Orient,enparticulierduQa- tar, l’avaient sauvé, injectant des milliards pour lerecapitaliser.Maisdansquellescondi- tions? Des poursuites judiciaires sont en cours. Le 12 février, le Serious FraudOffice, l’équivalent du Parquetnational financier, a inculpé la banque pour fraude. L’enquête se pencheenparticuliersur leprêtde3milliards dedollars (2,43milliardsd’euros)queBarclays aaccordéauQatarenmêmetempsqueceder- niersauvait labanque.De lààsuspecterque la banquerendaitd’unemaincequ’ellerecevait de l’autre… Quantà labanqueelle-même,après lavente de ses filialesenAfrique,elleestaujourd’hui recentrée sur le Royaume-Uni et les Etats- Unis et a largement perdu de sa splendeur. Reste enfin la catastrophe de Royal Bank of Scotland.A son apogée, l’établissement était leplusgrosaumonde.Depuis, iln’enfinitpas d’accumuler lespertes,de fermerdes filiales et de céder des actifs. En 2017, pour la pre- mière foisendixans, iladégagéunbénéfice net de 752millions de livres.Un «moment symbolique», veut croireRossMcEwan, son directeurgénéral.Lavéritéestquece résultat positifvientsimplementd’un jeucomptable: uneamendeattendueauxEtats-Unisn’apas étéprovisionnéedans l’exercicede2017.Pour lereste, labanquedemeureà71% lapropriété de l’Etat, son coursdeBourse est96% infé- rieuràsonpicet legroupes’apparenteplusà un zombie sousperfusionqu’àun établisse- mentsur lavoiede laguérison. Dans cette litaniededifficultés,unmotn’a pas été prononcé: Brexit. Les répercussions touchent essentiellementHSBC,quiparlede déplacer un millier d’emplois à Paris. Les autressonten revanche relativement indem- nes.Paradoxalement, cen’estpasunbon si- gne:celaprouvesimplementquecesétablis- sements sont aujourd’hui repliés sur le Royaume-Uniet largementabsentsdesmar- chés financiers.L’ombredecequ’ilsétaient il yaunedécennie. p @IciLondres UNE ENQUÊTE SEPENCHESUR LES3MILLIARDS DEDOLLARS QUEBARCLAYS AACCORDÉSAU QATAR ENMÊME TEMPSQUECE DERNIERSAUVAIT LABANQUE parbrigittebouquot L a protection du citoyen nu- mérique occupe le devant de la scène depuis plusieurs mois avec le règlement euro- péen sur la protection des données, ditRGPD.Quand lanumérisation est lemoteur de la croissance économi- quemondiale, il faut également bra- quer lesprojecteurssurunautretexte européen moins connu, la directive sur la sécuritédes réseaux etdes sys- tèmesd’information ( Networkand In- formationSecurity, NIS). Cettedirective,quiorganise la sécu- riténumériquedes Etatsmembres et des entreprises européennes, est en coursde transpositionenFranceavec ladésignationdeprèsde2000opéra- teursde servicesessentiels (OSE) sous lepilotagede l’Agencenationalede la sécurité des systèmes d’information (Anssi). Les entreprises de toutes taillesqui conduisentde solidespoli- tiquesdegestiondesrisquesontcom- pris que le risque cyber est devenu aujourd’hui un risque d’entreprise, pas simplementun risque technique. Ainsi,elles identifient lesscénariosde survenancedurisque,ellesenmodéli- sent l’impactéconomique,elles inves- tissentpourorganiser lacontinuitéde l’activitéetgérer la criseen casd’atta- que, et in fine financer certains im- pactsrésiduelspar l’assurance. Dansnotre économieouverteoù le risque cyber ne connaît pas de fron- tière, le couplage entre la directive NIS et la gestion des risques permet- traau tissuéconomique françaisd’or- ganiser une indispensable résilience numérique. En Europe, la France a toujours été à la pointe pour assurer la continuité de l’Etat et des grandes entreprises. Dès la Constitution de 1958, l’Etatn’aeude cessede sedoter d’un cadre législatif et réglementaire pour organiser la résilience de lana- tion.Avec lanotiond’opérateurd’im- portance vitale (OIV) – ordonnance dedécembre 1958,modifiée en 2004 –, «les entreprises sensibles sedoivent de coopérer à leur protection» . En 1960, laFranceestdevenue lepre- mierpaysà incluredanssa loidepro- grammationmilitairedesrèglespour garantir la sécuritéphysiquedes ins- tallations d’importance vitale et, de- puis 2008, leur sécurité numérique. C’est ainsi qu’est créée l’Anssi en 2009, jusqu’à l’ajout en 2013 d’un voletcybersécuritédans la loidepro- grammationmilitaire. DESMESURES INDISPENSABLES LesOIV, ce sont 230 entreprisesdont la listeestgardée secret-défense.Elles ont un devoir de protection et de maintien de leurs systèmes d’infor- mation,ainsiqu’undevoird’informa- tionde l’Anssien casd’incident.Cette dernière doit les accompagner et les contrôler. Renforcer leur continuité, en investissant et en gérant les ris- ques, c’est aussimaintenir leur com- pétitivité et leurs emplois et, par la diffusion de ces bonnes pratiques, ceuxde leurs clients etde leurs four- nisseurs. L’Europe s’est inspiréede ce modèle pour concevoir la directive NIS.Celle-ci adeux vertus. Les entre- prisesquiserontdésignéesOSEpour- rontseprévaloirdemesuresdecyber- sécurité étendues dans leur dialogue avec leurs partenaires – clients, four- nisseurs et pouvoirs publics. Elles auront également la responsabilité d’identifier dans leur propre chaîne devaleur les interfacesdeserviceses- sentiels avec leurs sous-traitants. Les exigences de cybersécurité leur se- rontalorsautomatiquement répercu- tées. Puis, par capillarité, elles le se- ront dans l’ensemble du tissu économique français, majoritaire- mentconstituédePMEetd’ETI. Ces mesures indispensables suffi- ront-elles àprotéger toutes les entre- priseset leursemplois?LesOSEpour- ront-ils entraîner un mouvement général de sécurisation des systèmes métiers en pleine numérisation? Même si ladirectiveprévoitd’inclure des fournisseurs de service numéri- que comme les plates-formes de vente en ligne, le flou subsiste, tant ellessontnombreuses. La sécuriténumérique de 2000 en- treprisesneconstituepascellede l’en- sembledu tissuéconomique français. Ilnous fautpasserde la résiliencenu- mérique de quelques-uns à celle de tous. C’est pour notre profession de «riskmanager»uneopportunité for- midabledepouvoiradosseràcesnou- veaux standards de cybersécurité les mesuresdegouvernancedumanage- ment des risques cyber ainsi que les couverturesadaptéesd’assurance. Il faut remercier les entreprisesqui témoignent aujourd’hui sur les con- séquences des attaques dont elles ont été victimes et les enseigne- ments qu’elles en ont tirés en ma- tièred’organisation,depréventionet d’assurance. A chaque fois, le diri- geantestau cœurde cette cybergou- vernance.Etreenmesured’exposerà sespartiesprenantesunesolidepoli- tiquedegestiondes risques,avecson volet cyber, devient aujourd’hui un facteurdifférenciant. Tous les acteurs savent que,malgré les protections, des attaques réussi- ront et que les impacts financiers se- ront significatifs et systémiques, c’est pourquoi il fautaméliorer lamaturité de l’assurance cyber,avecunegestion des risquespar filièreprofessionnelle. Dans cette organisation de l’intelli- gence collectivequi est lanôtre, seuls des standards de gestion des risques conçus par les entreprises, industrie par industrie, en y associant leur chaîne d’approvisionnement, feront émergerdesschémasviablesdetrans- fertdurisque,quipermettrontauxas- sureursd’indemniser en casde sinis- treetainsideconstruireunmarché. Ne soyonspasnaïfs,dans cetespace «gris»dumondenumérique, lesatta- ques proviennent parfois de puissan- ces étrangères: c’estpourquoi iln’y a pas de résilience de l’Etat sans rési- liencedesentreprises.A l’heureoù les indicateurs économiques retrouvent des couleurs, nous avons lesmoyens denepas laisser gonflerune «dette» de sécurité qui risqueraitde saper les fondements de cette renaissance. Car si la gestion des risques protège des menacesetdesvulnérabilités,elleper- met également l’audace en éclairant lesdécisionspourallerde l’avant. p ¶ BrigitteBouquot estprésidente de l’Associationpour lemanagement des risquesetdesassurances de l’entreprise (Amrae) Ungrandpaspourlagestion du«cyber-risque»parlesentreprises Parallèlementaurèglementeuropéen surlaprotectiondesdonnées,unedirective Sécuritédesréseauxetdessystèmes d’informationestenvoiedetransposition NOUSAVONS LESMOYENS DENEPAS LAISSER GONFLERUNE «DETTE » DESÉCURITÉ L’ÉCLAIRAGE Chômageetmystères delastatistique parphilippeaskenazy E n2007,lastatistiquepublique française vécut un fiasco. Alors que se profilait l’élec- tion présidentielle, les pre- mières exploitations en interne de l’enquêteemploide l’Inseeauprèsdes ménages concluaientàunebaissedu chômagebienmoindreque celle clai- ronnéepar legouvernement.Cédantà des pressions politiques ou sincère- ment inquiètede laqualitédesonen- quête– leshistoriens lediront–, ladi- rectionde l’Insee avaitdécidé en jan- vier 2007d’arrêter lapublicationdes chiffresduchômagepoursixmois,ar- guant que le taux de réponse à l’en- quête aurait légèrement diminué. Le malaise futprofondparmi lesprofes- sionnelsde la statistique, certainsdé- cidant d’alerter l’opinion. In fine, Eurostat, respectant les règlements européens, publia en mars 2007 ses propres estimations du chômage à partirde l’enquêteemploi. La leçondece fiascoaété tirée: ilest inutile de chercher à influer sur d s chiffres que l’Europe calcule de son côté.Cetépisodeaégalementété l’oc- casionde remettreàplat laméthodo- logie françaisedemesuresde l’emploi etduchômage.Sicelaaconduitàune nette amélioration des outils, l’inté- gration des observatio s d’une en- quête complémentaire auprès des non-répondants à l’enquête emploi futplusdouteuse. Il y avaitune logi- que institutionnelleà cela,puisque la question des non-répondants avait justifié lereportdepublication.Maisà peine un quart des n n-répondants répondaient à l’enquête complémen- taire.Commeiln’yapasd’enquêtesur lesnon-répondantsà l’enquêtesur les non-répondants (!),celaobligeaitàde fortes hypothèses, pour finalement accoucherd’un tauxdechômagemo- difiéde0,1pointdepourcentage. Une deuxième modification, légi- time d’un point de vue statistique, a plutôtbrouillé lesdébatspublics:aux chiffres sur le chômage trimestrielde l’Insee s’ajoutaient les statistiques mensuellesdePôleemploietde laDa- res [direction de l’animation de la re- cherche,desétudesetdes statistiques] , qui, de fait, étaient largement plus commentées. L’année 2018 marque une rati nalisationde cedispositif. Il faudra attendre avril pour avoir les données trimestriellesdesdeux insti- tutions, à la suite d’une décision de M me Pénicaud. L’Insee arrête égale- ment son enquête non-répondants (cequiva créerune rupturede série). Plutôt que d’en tirer des économies, les moyens dégagés pourraient être redéployéspourenrichir lesanalyses. CDIOUEMPLOISCOURTS ? Regardons le fameuxdernier trimes- tre 2017. Le 13 février, l’Insee apublié ses premières exploitations de l’en- quête emploi et son estimation des créations d’emplois salariés privés (y compris intérim),calculéesàpartirde déclarations etd’enquêtes auprèsdes entreprises. Trois semaines avant, l’Acoss [Agence centrale des organis- mesdeSécuritésociale] avaitpublié les statistiques exhaustives de déclara- tions d’embauches hors intérim de droitprivé. Selon l’enquête emploi, le repli du chômage aurait atteint 200000 per- sonnesenuntrimestre–unrecordde- puis la grande récession (la marge d’erreurestde+/−90000).Mieuxen- core, il est attribuable pour les trois quarts à une chute du chômage de longuedurée.Pourtant,auquatrième trimestre2017, lescréationsd’emplois salariés privés, certes dynamiques, n’auraientpasdépassé 54000 –dont 8000 dans l’intérim. Toujours selon l’enquête emploi, ce reflux du chô- mage s’accompagnerait d’une forte poussée des personnes en emplois courts,quiatteindraitd’ailleursunni- veau jamaisobservédepuis l’intégra- tiondecettecatégoriedans l’enquête. Or, lesdonnéesde l’Acossrelèventune nette progression des déclarations d’embauche…enCDI. Commentmettre en cohérence ces chiffres en apparence peu compati- bles? On pourrait imaginer des em- bauchesmassivespar lesparticuliers employeurs,ou encoreunemassede travailleursdesplates-formesnuméri- quesquisedéclareraientsalariésdans l’enquêteemploi, toutenétant invisi- bles dans les statistiques d’entre- prise… Mystère. Le cadencement tri- mestriel devrait pourtant offrir l’op- portunité à la statistiquepubliquede ne plus se contenter de publier des chiffres conjoncturels, mais d’offrir auxcitoyensetauxdécideursdesclés d’interprétation. p ¶ PhilippeAskenazy estchercheurauCNRS/ ENS/centreMaurice- Halbwachs Cahierdu«Monde»N o 22746daté Mercredi28 février2018 - Nepeutêtrevendu séparément EUROPE POLÉMIQUE AUTOUR D’UN PARACHUTAGE À BRUXELLES PAGE 4 CAMPUS QUAND LES ÉTUDIANTS APPRENNENT PAR LE JEU PAGE6 PERTES&PROFITS | AÉROPORTDE TOULOUSE Barbaresdel’Ouest,barbaresdel’Est S elon la légende, c’est lepremierempe- reur de Chine, Qin, qui édifia la pre- mière grande muraille au nord du fleuve Jaune,pour contenir lesassauts des barbares du Nord. Durant plus de deux milleans,chaquemonarquede l’empireduMi- lieuaapportésapierreauplusgrandédificehu- main jamais construit.Cetteobsessionn’apas empêché lepaysd’êtreenvahiàplusieursrepri- sespar lesMongolset lesMandchous. Apréent, lesChinoisn’ontpluspeurduNord et foncentvers l’Ouestenouvrant les«nouvel- lesroutesdelasoie».AuxEuropéensdemonter desrempartsà lahâte.L’armed’aujourd’huiest lafinance.Laprotectionseradonc légale.Enre- fusant, lundi26 février,decéder lecontrôlede l’aéroportdeToulouseaugroupechinoisCasil, l’Etat françaisaédifiéunpetitmuret,devant la colèredesélus locaux. L’inquiétudemontequantauxambitionsen Europe des Chinois, dont les coups d’éclat se multiplient.Vendredi 23 février, on apprenait que leconstructeurchinoisGeely,déjàproprié- tairedeVolvo,avaitacquisprèsde10%ducapi- taldeDaimler, leplusprestigieuxconstructeur automobile allemand.En France, legouverne- mentadécidéderenforcersonarsenalenétof- fantnotamment la liste des secteurs stratégi- quspour lesquelssonavalestobligatoire. LesélusdeToulousecraignentqueCasil,pro- priétédu conglomératpublicde la régiondu Shandong (nord-estde laChine),ne siphonne latrésoreriede lasociétépours’assurerdesdi- videndes.Maisc’estaussiuntestde lacapacité de laFranceà résoudreun casse-têtepasuni- quement chinois: comment finacer ss en- treprises sansperdre sa souveraineté. L’épar- gne longue françaiseexiste (l’assurancevie…), mais elle irrigue insuffisamment le tissu en- trepreneurial. Alors, quand l’argentmanque au développement, les entreprises vont le chercher ailleurs. Et notamment, en cemo- ment,enChineouauEtats-Unis. Unerazziasur l’Europe Car lesbarbaressontaussià l’Ouest.Dopéspar des trésoreries historiques, les groupes et les fondsaméricainss’apprêtentàmeneruneraz- zia sur l’Europe àdesniveauxdevalorisation vertigineux.LaFrances’inquiètepourses fleu- rons, lesL’OréalouSanofi,maisaussipourses jeunespoussesencoremaigrichonnes, lesBla- blacar ou Sigfox, dont la croissance ralentit alorsque lesbesoinsaugmentent. Dans lespalaisde laRépublique,ons’activeà imaginerdssolutionsd’urgencepouréviterla débâcle.Unfondsde3milliardsd’eurosestmis enplacechezBpifrancepourrépondreauxatta- ques sur les start-upde la FrenchTech en en- trantdans leur capital. La France, comme ses voisinsduVieuxContinent, cherch sonmo- dèle,àmi-cheminentreceluide lastart-upna- tionIsraël,efficace,mai quilaisefilersesfleu- ronsauxEtats-Unis,etceluide laChine,quine lâche rienmais fonctionnedeplusenplusen circuitfermé,àl’abridesesnouvellesmurailles. Lasolutionseraeuropéenneouneserapas. p philippeescande j CAC 40 | 5347,98PTS + 0,07% j DOW JONES | 25709,27PTS + 1,58% j EURO-DOLLAR | 1,2332 J PÉTROLE | 67,28$ LE BARIL j TAUX FRANÇAIS À 10 ANS | 0,938% VALEURS AU 27 FÉVRIER À 9H30 Mediaset:pas d’accordentre lesBolloréet lesBerlusconi M ardi27févrierapris fin un feuilleton qui a commencé au prin- temps 2016 : celui de l’accord noué entre Vivendi etMediaset. Après des discussions intermina- bles, le groupedemédiasdeVin- centBolloréet celuideSilvioBer- lusconi se retrouveront au tribu- nal. Le délai de médiation est dépassé. Le clan italien réclame aux Français plusieurs centaines de millions d’euros pour avoir rompu le deal dans lequel ils s’étaient engagés à acheter sa fi- liale e télévisionpayanteMedia- set Premium. Le contexte électo- ral a joué: les élections générales vont se tenir le4marsen Italieet leCavaliereSilvioBerlusconia re- trouvéuneplaceenviabledans le jeu politique transalpin. Ce qui a pu encourager ls dirigeants de Mediaset à durcir leurs positions vis-à-vis des Français. Ce revers marqueaussi l’échec,danscedos- sier,de laméthodedeM.Bolloré, habituéàmêler rapportde forces et connaissance finedudroitdes entreprisesetde laBourse.Sur le fond, cette déconvenue vide de sonsn l projet de «Ntflix d’Europe latine»que leprésident du conseil de surveillanc deVi- vendi exposait à l’été 2016. Pour peser, il lui reste l’actif Telecom Italia, dont il est premier action- naire.Mais, là aussi, la route est seméedequelquesembûches. LIRE PAGE 8 25 % C’ESTLAPARTDEVIVENDIDANSLE CAPITALDETELECOM ITALIA.LE GROUPEFRANÇAISRESTELEPRE- MIERACTIONNAIREDEL’OPÉRATEUR Le robot5Gdu japonais Docomo,auMobileWorld Congress,àBarcelone, le26 février. PAUBARRENA/AFP Lesecteurdestélécomsaccélèredansla5G ▶ Lacinquième générationde téléphonie mobile,quiprometplus dedébitetdevitesse, estaucœurdesannonces duMobileWorld Congress,àBarcelone ▶ Cette technologie permetd’imaginerde nombreusesapplications dans lavoitureconnec- tée, l’industrie4.0… ▶ Leséquipementiers télécomsyvoientun moyender lancer l urs ventes,quand lesopéra- teurss’interrogentsur lemodèleéconomique PAGE 8 Lessy icat delaSNCF et du publicpréparentleurriposte ▶ LeclimatsocialsetendàlaSNCFetdanslafonctionpublique.LaurentBerger(CFDT)fustigela«méthodeMacron» E nannonçant, lundi26février, lere- coursauxordonnancespourréfor- mer laSNCFet la findu statutdes cheminotspour lesnouvelles recruesde l’entrepris publique, lepremierministre, EdouardPhilippe,devaits’attendreàune vive réaction des syndicats. Elle n’a pas manqué. La CGT, l’UNSA, SUD-Rail et la CFDT, les quatreorganisations représen- tativesàlaSNCF,ontprévudeseréuniren intersyndicale dès mardi. L’UNSA, deuxièmesyndicatde l’entreprise,a indi- quéqu’elleproposeraune grève avant la journéed’actiondu22marsdans la fonc- tionpublique.EllefaitéchoàlaCFDT-Ch- minotsqui,bienquenonassociéeàcette mobilisation, a souhaité «appeler à une grève reconductible à partir du 12mars», selon son secrétaire général, Didier Aubert. «L’importantestd’êtreunitaires», a ajoutéBrunoPoncet, secrétaire fédéral de SUD-Rail, qui voit dans les annonces gouvernementales une volonté de «casserdu cheminot», de «casser l’entre- prisepublique et creuser les inégalités en- tretous lesFrançais» . Dansunentretienau journal LesEchos, à la tonalité très critique à l’égard de la «méthodeMacron», lenumérounde la CFDT,LaurentBerger,a fustigé le recours auxordonnancespour laSNCF.S’il sedit prêtàdiscuterdes conditionsde l’ouver- ture à la concurrence ou de l’évolution de lagouvernancedugroupe ferroviaire, il estime que «les difficultés de l’etre- prisenepeuvent se résoudreau statutdes cheminots,aprèsdesannéesdesous-inves- tissement» . guydutheiletbenoîtfloc’h LIRE LA SUITE PAGE 3 ANALYSEZ2017 // DÉCHIFFREZ2018 220PAGES 12€ ATOUT RISK MANAGER, LA REVUE DES PROFESSIONNELS DU RISQUE ET DE L'ASSURANCE I N°16 I PRINTEMPS 2018 81

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